Est ce que les amoureux se choisissent par hasard?

Portrait de Claire-13

L'amour me fait un peu peur mais est ce que vous savez si les amoureux se rencontrent, se choisissent et s'aiment par hasard?

Portrait de Cécile

Bonjour Claire !

Un grand mystère que cette question de l'amour ! En ce qui me concerne, je ne crois pas au hasard et l'homme avec qui je me suis mariée, même si j'ai divorcé par la suite, il fallait qu'il soit sur ma route pour que j'évolue. D'autant que mes enfants ne se seraient pas incarnés sans cette union...

Vous dites que vous avez un peu peur de l'amour. Je peux comprendre ! Mais quelle est votre définition de l'amour ? Je pense  qu'il ne faut pas trop l'idéaliser de manière ne pas s'en inquiéter lorsqu'il pointe son nez. a ce propos, j'aime bien ce qu'en dit Molière dans une de ses pièces : " Il le faut avouer, l'amour est un grand maître. Ce qu'on ne fût jamais, il nous enseigne à l'être... " Alors, je vous dirais : n'ayez pas peur !

Je dois me rendre à mon travail, mais je reviendrai voir les réponses qui vous seront apportées...

Cécile

Portrait de Opale

Je me permets de répondre bien que je ne sois pas psy... Pour moi, non, il n'y a pas de hasard dans les rencontres amoureuses. J'ai souvent pu constater que les amoureux s'attiraient, se reconnaissaient, inconsciemment, pour diverses raisons. Le plus souvent, c'est une même histoire personnelle, ou familiale qui les rapproche - des mêmes racines par exemple... Il peut y avoir aussi des complémentarités...

Ces attirances sans hasard me semblent également valables pour le choix d'un ami bien sûr, mais aussi d'un employeur, d'un forum, etc...

Je ne m'avancerais pas plus, car chaque cas est particulier ensuite, et je laisse la parole à d'autres pour parler de l'amour, car dans mon idéal il amènerait à ressentir et à dire "- c'est lui, c'est elle", avec une certitude de fond, tranquille, qui ne laisse aucun doute.
Mais j'ai toujours été une grande idéaliste.

J'espère que vous aurez d'autres réponses.

Portrait de Cécile. G.. Psychanalyste

Bonjour Claire,

Freud disait que les névroses s'attirent et se complètent. Ce qui sous-entend qu'il n'y a pas de place pour le hasard dans la rencontre amoureuse.

Chaque être humain est porteur d'un symptôme transgénérationnel ( alcoolisme, homosexualité, ...) qui est caché, et, c'est ce symptôme qui va faire la rencontre.

Il y a deux sortes de couples :

Le couple but, qui se rencontre pour maintenir le symptôme (il doit rester caché). il faut l'entretenir et le transmettre aux enfants. Si le symptôme devient apparent ou cesse pour l'un deux, le couple se sépare. Par exemple, après le décès de l'enfant porteur du symptôme.

Le couple sens, qui se rencontre pour éliminer le symptôme, lâche cette notion de double, de fusion, et, c'est la complémentarité qui se met en place avec une ouverture sociale qui permet de sortir de ce microcosme. Chacun fait miroir à l'autre, il y acceptation de l'autre dans sa différence et dans son rythme. Il peut ne pas y avoir d'enfant. 

Certes c'est le symptôme qui fait la rencontre mais l'amour vient de surcroit. Quelque soit les rencontres que vous ferez, but ou sens, elles seront toutes teintées d'amour et riches d'enseignement.

Portrait de Floriane

Paul Eluard a écrit: "Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous."

Ce qui rejoint ce que vient d'expliquer Cécile, et qui m'éclaire sur la différence entre couple but et couple sens et ce que recouvre le deuxième notamment, qui restait un peu flou pour moi. Merci.

Portrait de Gilbert

Il me semble que Sigmund Freud, lors d'une conférence, " Introduction à la psychanalyse ", donnée devant un parterre de médecins, a " hystérisé " son auditoire en avançant que les artistes étaient plus ouverts  aux manifestations de l'inconscient que les intellectuels... Aussi, j'aime beaucoup cette juste parole de Paul Eluard, un poète qui me parle beaucoup. Effectivement, il n'y a pas de hasard, mais des rencontres qui permettent, tel un miroir, la rencontre avec soi... Par la " ré-flexion " ;-)... But ou sens, il est de toute manière toujours question d'amour... Et, quoi qu'on " en saigne " parfois, il enseigne toujours ! Bonne journée à tout le monde !

Portrait de Isabelle

Je rejoins ce qui a été dit plus haut... Pour ma part, je pense que je suis également, comme le souligne Opale, plutôt idéaliste au sujet de l'amour... Le problème, c'est qu'à trop idéaliser, un jour ou l'autre, la réalité fait aussi irruption, et peut effectivement se traduire par un effet "destructeur" quelquefois... ou tout au moins, générant des attérissages assez mouvementés... Personnellement, il m'a fallu envisager ce sentiment avec plus de maturité et donc de façon peut-être moins passionnée... Cependant, tout mon vécu côté amour, m'a jusqu'à présent toujours encouragé à une réflexion sur de véritables et enrichissantes remises en question personnelles... Mais, et parce que mon titre y fait allusion, je pense que toutes les situations amoureuses très bien décritent par Marivaud justement, ont à mon sens leurs raisons d'être dans la mesure où c'est ce que nous devons vivre pour au moins grandir un peu... Ne serait-ce que pour apprendre à voir ce qui nous convient ou pas déjà, et aussi, qu'en amour d'autant plus, accepter que rien n'est jamais acquis en soi... Mais il me semble aussi, qu'une relation amoureuse épanouissante passera par le fait même, que d'apprendre à s'aimer soi-même... est sans doute la meilleure possibilité d'accueillir "l'autre" dans ses différences qui seront alors complémentaires aux nôtres... Et bien que je n'ai plus votre âge Claire-13, je n'ai toujours pas renoncé à ce jour à un véritable partage dans une relation de couple, car je reste une incorrigible optimiste à ce sujet... et tout autant persuadée que toutes mes histoires d'amour passées, valaient d'être vécues...

Portrait de Amélie

Pour vous répondre Claire, moi qui suis mariée et heureuse de l'être depuis 25 ans ! Je ne crois pas au hasard et je reste certaine, même après 25 ans de vie commune (!) que j'ai rencontré celui qui me correspondait... Alors bien entendu, vous pourrez toujours me dire, que c'est peut-être plus facile de le dire comme celà, lorsqu'on est marié depuis longtemps... Pourtant, je ne crois pas qu'il soit nécessairement plus aisé de vivre une relation de couple "longue dans la durée" plutôt que plusieurs pour un temps équivalent... Peut-être qu'un temps plus important, permet de mieux "voir", les affinités, les complémentarités et aussi tout ce qui fait qu'on est aussi différent, et j'insiste sur ce point, qu'il est important pour qu'un équilibre soit toujours présent, de continuer aussi à "cultiver" ses différences... En tout cas Claire ! Quelles que soient les amours des uns et des autres, chacun vit ce qu'il a à vivre, pour moi c'est indiscutable ! L'important est toujours de "faire pour le mieux" en son âme et conscience... Et pour lire souvent ici, je crois que vous saurez faire quand ce sera le moment pour vous !

Portrait de Claire-13

Je vous remercie parce ce que vous répondez bien à ma question et que je crois avoir comprit .

Ensuite, d'accord ce  symptome me fait un peu peur mais ce que j'aime bien c'est que l'amour est la pour nous faire avancer...

Je ne voyai pas la rencontre de deux chéris comme ça mais je trouve que finalement ça n'est pas plus mal!

Portrait de Opale

Bonjour Cécile,

Je voudrais revenir sur votre post que jai beaucoup apprécié, avec une petite question svp.

Serait-il possible que dans un couple naissant, l'un des deux veuille un couple "but" et l'autre un couple "sens", ce qui expliquerait une histoire impossible car chacun "tirant la relation" dans un sens où l'autre ne veut pas aller, malgré l'amour ou l'attirance ?

Merci par avance...

Portrait de Cécile. G.. Psychanalyste

Le symptôme transgénérationnel est le symptôme de la filiation qui se transmet de génération en génération.

Vous avez raison, Opale.  Un couple qui démarre une relation,  l'un sur le " but ", et l'autre sur le " sens ", ne peut pas fonctionner harmonieusement. 

Celui du couple " but ",  par respect pour la filiation, va vouloir, inconsiemment, pérenniser ce symptôme. Pour cela, il doit le taire. Mais, par mécanisme de défense interposé, il va le projeter névrotiquement sur l'autre.

Celui du couple " sens " à l'inverse désire, toujours inconsciemment, épuiser le symptôme, le faire chuter en le laissant jaillir et le donner à voir. 

Les deux partenaires ne regardant pas dans la même direction, difficile alors de cheminer ensemble.

J'espère, Opale, avoir répondu à votre interrogation. Merci en tous cas  pour l'intéret que vous portez au forum de Signes et Sens et au plaisir de vous lire.

Cécile. G

Portrait de Opale

C'est très clair, Cécile, et je vous en remercie. Et d'une réponse qui fait avancer d'un petit pas, surgissent d'autres questionnements comme pour aller encore un peu plus loin.... passionnant. Merci aussi à tous, forumeurs et psy qui enrichissent cet espace. C'est intéressant de voir que chacun trouve un petit peu de ses réponses dans chaque post. Poursuivons.

Portrait de Sofia M

D'un point de vue purement théorique, et sans vouloir vous offenser Cécile G., je ne suis pas d'accord avec ce que vous expliquez...

Souvent, trop succintement, l'apport psychanalytique (de vulgarisation) parle de " couples but " et de " couples sens " mais c'est réducteur dans la mesure où c'est erroné car un " couple sens " ça n'existe pas ! Vous le dites vous-même en reprenant le postulat de Sigmund Freud : " Les névroses s'attirent et se complètent ". Ce qui signifie que s'il n'y a pas névrose, il n'y a pas couple. En fait, ce qui se passe et comme vous l'avez expliqué, les deux membres d'un couple se rencontrent à cause du symptôme transgénérationnel qui les unit inconsciemment et qui permet donc qu'ils cheminent ensemble un temps. Deux cas de figure apparaissent alors :

1) - Le couple but se nourrit et alimente le symptôme par fidélité filiale, par loyauté familiale, en devient victime et se repaît de cette " fatalité ", en victimisant beaucoup, c'est-à-dire en faisant grossir la plainte et, par voie de conséquence, l'oralité démoniaque. Partant de là, soit le couple mater dolorosa / pater dolorosa tient le coup de façon héroïque et il n'y aura pas de séparation ou de divorce, peut-être des trahisons sentimentales, mais - quoi qu'il en soit - le symptôme continuera à œuvrer en sous-marin, implicite ou explicite, fabriquant souvent de la phobie et ainsi du déplacement qui aboutit à des formes symptomatiques apparemment éloignées du symptôme de départ mais dont on retrouve, en cure, la même essence...  Soit le couple se sépare, ce qui ne résoudra rien pour l'essoufflement du symptôme ou sa disparition puisque les objets d'amour choisis a posteriori auront le même symptôme transgénérationnel !

2) - Le couple dit sens n'existe donc pas en son fondement. Une preuve, c'est que le Christ, qui était (et qui reste) le symbole même du sens, n'a jamais vécu d'histoire de couple... Il était dans l'Amour depuis sa conception et n'avait pas besoin d'amour pour génitaliser ses pulsions et les sublimer. Ça lui avait été donné par le Père dès le départ et il était appelé à mettre son énergie dans d'autres sphères d'humanisation... Pour revenir au couple dit sens, il est à l'origine - encore une fois - un couple but au moment de sa rencontre mais soit les deux partenaires ont une destinée qui leur permet de sublimer quasiment de concert (ce qui est rarissime) le symptôme transgénérationnel par médiation interposée (spiritualité, psychanalyse - je dis bien psychanalyse car aucune psychothérapie ne permet une génitalisation des pulsions, s'arrêtant au travail qui porte sur le dire, la libido orale), soit un seul des deux éléments du couple accède à la sublimation du symptôme, ce qui est suffisant - mais pas toujours - pour que le symptôme cède définitivement. Freud disait que si la femme sublimait le symptôme, les résultats étaient meilleurs que si l'homme y parvenait... Là également, il peut y avoir séparation ou pas... Le sens n'est pas synonyme d'entente parfaite et cordiale ! Il existe d'ailleurs des couples qui se séparent après la disparition du symptôme transgénérationnel puisque le boulot est terminé !!!

Si vous reprenez le concept de sublimation, vous constaterez d'ailleurs que Freud le situe après l'Œdipe complet, ce qui confirme que quand un couple se rencontre, il ne peut qu'être inscrit dans le but de la filiation...

Si vous n'êtes pas d'accord, on peut en discuter Cécile G., et ce serait bien aussi, à mon " sens ", que des psys viennent se joindre à nous pour développer cette discussion et donner leur avis...

Portrait de Gilbert. R. Psychanalyste

La question d'Opale est passionnante. Encore une fois, il est difficile d'y répondre sans éviter quelques accros au niveau d'une interprétation théorique.

Ceci dit, merci à Cécile G. d'avoir tenté l'aventure sur un sujet essentiel. Je rejoins toutefois le développement de Sofia, toujours rigoureux et ne laissant rien " passer " qui puisse entretenir une certaine confusion. En effet, s'il y a rencontre, elle est toujours motivée inconsciemment par un but. D'où le concept de sublimation, clairement éclairé ci-dessus en faisant allusion au Christ. D'ailleurs, dans l'absolu spirituel, un moine change de nom et sublime ainsi le symptôme filial. A condition bien sûr que ce ne soit pas un évitement et une fuite. Ce qui est toute la différence entre religiosité et spiritualité authentique.

Cette notion de sublimation reste en effet le " sens " d'une cure analytique menée le plus loin possible. Le symptôme, qu'il lâche ou pas, devenant un allié au service du plus grand nombre. Il serait bon, en effet, comme le souligne Sofia, que d'autres forumers (psy ou pas !) viennent partager leur avis, d'autant que beaucoup possèdent des acquis psychanalytiques suffisants pour faire évoluer cette discussion, encore une fois passionnante !

Je sais que beaucoup de gens, concernés par le sujet, nous lisent régulièrement. Je leur envoie ce message chaleureux : osez écrire ! C'est le premier pas qui compte... Amitiés analytiques et humanistes !

Gilbert Roux

Portrait de Cécile. G.. Psychanalyste

Votre explication Sofia me convient, comme c'est très souvent le cas, car elle éclaire le couple d'une notion de transformation et d'évolution. Mon interprétation de la théorie inscrivait le couple dans une fatalité qui n'existe pas. Tous les couples sont " but " au départ et ont la possiblité d'évoluer seul ou à deux, au sein du couple ou pas. Cela lève ce côté " élu " et culpabilisant. 

Je réalise humblement, en passant par moi, par ma propre histoire, que mon interprétation ne " collait " pas. Non seulement, je ne suis pas offensée, Sofia, mais je vous remercie pour votre apport généreux et très intéressant. 

Portrait de Sofia M

Votre réaction, Cécile, donne vraiment à réaliser les atouts d'une belle génitalisation des pulsions...

Merci à toutes et à tous pour tout ce que vous apportez et dont je ne me lasse pas... J'ai même avancé ma pause travail  cet après-midi pour venir aux nouvelles !