Qu'est-ce qu'un koan ?

Portrait de iverlaine

J'ai pris en route ce matin une émission qui parlait de koan.
Je n'ai pas très bien compris de quoi il s'agissait.
Pouvez-vous m'expliquer et me donner des exemples ?

Portrait de Jean

Bonjour Iverlaine,

D'après ce que je crois en savoir pour m'être intéressé au bouddhisme zen, le koan est un aphorisme sous forme d'interrogation qui demande à être médité par le disciple en dépassant l'intellect. Exemple : " Quel est le bruit d'une seule main ? ", " Quel était votre visage avant votre naissance ? ". Une question qui défie la logique rationnelle et qui n'a de sens que pour le méditant. Le maître ne donne pas une phrase au hasard à n'importe qui. Mais peut-être que des spécialistes du bouddhisme zen en savent plus sur ce sujet ?

Portrait de Lucien

Voici un kōan qui continue depuis des années à me faire réfléchir et travailler...
Deux élèves bouddhistes discutent à l'extérieur. Un léger vent souffle. L'un des jeunes gens demande à l'autre qui fait souffler le vent. Son ami lui répond en l'interrogeant sur qui fait bouger les drapeaux. Leur maître, ayant entendu leur conversation, leur dit : " Ce sont les pensées qui agitent l'environnement "...

Portrait de Orlan

Personnellement, je trouve que tout kōan est magique dans la mesure où il combat la pensée unique. Comme l'explique très bien Jean, le méditant se l'approprie comme il le désire, en fonction aussi de son évolution du moment et de ce qu'il traverse. À mon tour, je vous livre un kōan qui m'a fait beaucoup avancer et que j'utilise lorsque le besoin s'en fait sentir...
. Une jeune femme se trouve chez le coiffeur et au bac à shampoing. Elle se dit que décidément elle ne sait pas comment elle se débrouille : chaque fois qu'elle se fait laver la tête le bac s'écoule mal. Quelque temps après, elle se retrouve chez le même coiffeur, toujours au bac, entre deux jeunes femmes. L'une d'entre elles dit tout haut : " Je ne sais pas comment je m'y prends mais je tombe toujours sur le bac qui est bouché ". L'autre cliente dit que pour elle, c'est exactement la même chose... Tout d'un coup, elles entendent le patron dire à son employé : " Il faut que je m'occupe d'appeler le plombier pour qu'ils viennent voir pourquoi ces trois bacs se bouchent tout le temps "...
Ce kōan, réactualisé façon 20ème siècle, nous a été transmis par un coach en séminaire. À la suite de cette transmission, je lui avais dit que, en ce qui me concerne, c'était au supermarché que je tombais systématiquement sur une caisse bloquée et que j'aimerais bien comprendre pourquoi... Il ne m'a jamais répondu ! J'étais vexé comme un pou mais après réflexion, j'ai vraiment compris ce qu'était un kōan : pour moi, il s'agit d'un véritable cadeau de centration et de sagesse évolutive. D'ailleurs, si certains foromers veulent bien partager d'autres kōans avec nous, ce sera super !

Portrait de iverlaine

C'est au-delà de ce que j'imaginais. Je vais essayer d'aller plus loin car je crois avoir saisi le sens même du kōan et ça me passionne. Je ne saurais trop vous expliquer pourquoi mais en lisant les exemples que vous m'avez donnés, j'ai reçu de l'Amour, un Amour disponible pour moi, que je peux diriger vers moi pour progresser en confiance... J'ai le sentiment que le kōan est un outil exceptionnel qui peut aider réellement en cas de besoin. Abordé de façon superficielle, ça peut sembler, dur, castrateur, ingrat, mais je pense que cette méthode a été créée et existe pour que le libre-arbitre du méditant puisse s'exprimer...

Portrait de Gilbert

" Qui excelle au tir ne touche pas le centre de la cible. "

Ce koan me parle d'humilité. Pour moi, il évacue le but pour privilégier le sens... Mais ce n'est que ma propre tentative de résolution Smile

Portrait de Juliette

J'adore Gilbert votre Koan (je ne connaissais pas avant). 

Pour moi, c'est chercher son propre centre à soi, faire ce qui est bon pour soi et ne plus faire ce que l'autre attend de vous mais pour y arriver il faut beaucoup de travail. Effectivement ça demande de l'humilité.Wink

Portrait de Sofia M

Je ne connaissais ni la forme du kōan, ni le fond mais en découvrant vos commentaires, ils m'ont ramenée à la psychanalyse. Je veux dire par là qu'un psychanalyste peut donner l'illusion de répondre à ses analysants mais, en fait, il ne répond jamais aux explicites émises par ses patients, ne réagissant qu'à l'émission de leurs implicites, c'est-à-dire que le renvoi du transfert ne s'effectue que par l'utilisation de l'homonymie.

Portrait de Gilbert. R. Psychanalyste

 " La recherche du sens a déjà été pratiquée, par exemple par certains maîtres bouddhistes, avec la technique zen. Le maître interrompt le silence par n'importe quoi, un sarcasme, un coup de pied.Il appartient aux élèves eux-mêmes de chercher la réponse à leurs propres questions dans l'étude des textes ; le maître n'enseigne pas ex cathedra une science toute faite mais il apporte cette réponse quand les élèves sont sur le point de la trouver " tel est le discours de Jacques Lacan  lors de l'un de ses séminaires. Ce qui confirme ce que dit Sofia par rapport à la similitude du koan avec la psychanalyse.

Un koan lacanien très intéressant au niveau des homomynies : " Les-Noms-Du-Père " ou " Les-Nons-Du-Père " deviennent aussi " Les non dupes errent ". Une errance pleine de sens lorsque la duperie en est exclue. Une errance qui peut être passionnante car pleine de possible à venir et toujours en marche. Je la mets, pour ma part en résonnance avec " De la frustration naît le désir "... A chacun d'en laisser résonner sa propre interprétation !