Ils peuvent être plutôt nantis et donner l'impression d'en vouloir toujours plus... Ils évoluent, plus ou moins bien masqués, dans leur famille et/ou dans la société. On les croise ou on est amené à les fréquenter, un temps ou plus longtemps, et c'est là que se situe le drame. Les prédateurs cherchent à posséder ce qui ne leur appartient pas, le subtilisent habilement, en font leur propriété et s'en nourrissent au détriment de leur entourage. Utilisant, au sens figuré, un mode de fonctionnement semblable à celui des animaux qui s'attaquent à des espèces affaiblies, en général par la maladie, ces tristes individus font des ravages psychologiques...
La prédation humaine a recours à un positionnement psychique étonnant. Cette attitude s'étaye sur une sorte d'intuition qui place le bourreau à l'endroit idéal pour capturer le butin...
. Jeanne et sa fille Olivia font un séjour en Bretagne, à Quimper très précisément. Leur vieille tante, qu'elles ne fréquentent pas et dont elles ne s'occupent jamais, y habite. Cette femme décède. Ses deux nièces sont prévenues. Étant sur place, elles orchestrent les obsèques, pour " soulager " la fille de la défunte, célibataire sans enfant, et parviennent à se faire remettre par l'héritière des objets de valeur sentimentale pour elle !
. Fabienne est médecin depuis dix ans dans un cabinet de groupe. Un nouveau confrère vient agrandir cette société. Prétentieux et phallocrate, elle se rend compte qu'il met une distance désagréable avec elle. Un jour, il l'entend raconter à une des secrétaires qu'elle a le désir d'acheter la maison dans laquelle elle passait enfant ses vacances, maison pleine d'excellents souvenirs pour elle, et qu'une patiente du cabinet a mise en vente : elle vient de commencer les démarches nécessaires auprès des banques pour obtenir un prêt au taux le plus intéressant. Étonnamment, le médecin se rapproche d'elle et se fait confirmer le nom de la propriétaire et vendeuse. Fabienne apprendra trois semaines plus tard qu'il a signé un compromis de vente concernant cette propriété !
. Pierre a pour meilleur ami et confident Olivier. Pierre connaît des difficultés de couple avec Virginie, sa compagne, depuis qu'elle s'est liée d'amitié avec une responsable du magasin dans lequel elle travaille. Il estime que l'influence de cette collègue est néfaste pour le couple. Olivier lui propose d'essayer de parler à Virginie, subtilement... Tellement subtilement qu'il vit aujourd'hui avec elle !
Ainsi le prédateur est-il là où il faut, quand il le faut, pour nuire à autrui. Monique Pinçon-Charlot, sociologue, parle même de " violence dans ce processus de déshumanisation "... La question essentielle à se poser, pour essayer de se protéger de ce genre humain peu fréquentable, doit envisager le processus inconscient dont ces individus lamentables se servent pour arriver à leurs fins...
Le principe de base requiert de saisir que le prédateur est uniquement intéressé par tout ce que peut " avoir " son entourage, combien même a-t-il déjà beaucoup plus que lui. Ce profil pathologique ignore donc l' " Être ". Pour lui, tout humain est un objet qu'il assimile et confond avec les objets. Il détermine et attribue une notion de valeur en fonction de la rivalité qui l'unit à sa proie. Autrement formulé, il ne le dépossèdera que de ce qu'il a de plus " cher ", mais sur un plan affectif... Le prédateur n'est attiré que par des sujets qui réveillent et attisent sa jalousie, jalousie qui remonte aux premières années de son existence et dont il ne s'est jamais débarrassée. Une solide vigilance s'impose pour ne pas tomber dans ses griffes.
Dès l'école, la dépossession œuvre. L'agression touche davantage des enfants qui ont des problèmes familiaux, manquant de fait d'énergie et de combativité et ce, contrairement à des idées reçues. Effectivement, il ne s'agit pas de confondre prédation et vol. Entendons par-là qu'un enfant qui sera battu par plusieurs élèves, pour se faire remettre quelques pièces de monnaie, est victime d'un vol. La nuance se fait à la lumière du prédateur qui évolue seul et qui ne fonctionne jamais en groupe. Dans la cour de l'école, il ne s'intéressera qu'à l'objet de l'enfant dont il sentira qu'il lui est attaché par des liens affectifs puissants. Cet enfant pourra toutefois être malheureux mais le prédateur sait que cet enfant a des ressources qui lui permettent de s'adapter quoi qu'il puisse lui arriver dans la vie. À l'inverse, la prédation cache une incapacité à s'adapter. D'ailleurs, la caractéristique fondamentale du prédateur consiste à vouloir que son petit monde s'adapte à lui... Il n'y parvient cependant pas mais peut en avoir l'illusion dont il puise la force pour continuer ses désastres. C'est de la sorte que, pour le repérer, il est nécessaire d'objectiver ses recherches d'obtention de soumission de la part de son environnement. Quelques signes représentent des indicateurs fiables :
. Sa manière de se positionner en dominant : elle peut apparaître discrète mais s'appuiera massivement sur une position supérieure en terme de diplômes, d'argent ou de niveau social.
. Une jouissance curieusement affichée face aux ennuis de son environnement.
. Un ton péremptoire.
. Un avis définitif sur tout.
. Des tentatives de prise de pouvoir systématiques.
Le prédateur est un guerrier qui ne renonce jamais. Il s'arrange avec sa réalité, réduit ceux qu'il envie, (se) ment. Ne pouvant supporter la vérité et à force de (se) raconter de vilaines histoires sur tous ces autres qui l'excèdent en acceptant leur chemin de vie tel qu'il se présente, il forge une mythomanie pathétique mais qui rencontrera finalement de moins en moins d'échos... Sa tragédie ? Faire de son désespoir interne une arme fallacieuse car le prédateur a recours à des prétextes infantiles pour assouvir ses démons qu'il alimente d'une contradiction vis-à-vis de lui-même : en croyant tromper, il se trompe... Pour le pire...