Comment être vraiment soi-même ?

Portrait de Horia

J'ai lu une citation de Jean d'Ormesson qui dit que " Par le plus grand des paradoxes, vous n'êtes pleinement vous-même qu'à l'instant où vous perdez tout contrôle sur vous-même "...
Je ne comprends absolument pas ce que cet écrivain veut dire. S'agit-il d'un but positif ou négatif ? Veut-il parler de lâcher-prise ? Veut-il nous transmettre que c'est le sens de la vie ?
Je me prends la tête tous azimuts avec cette phrase et ça ne fait que m'embrouiller et me décourager...
Merci de m'aider à y voir clair.

Portrait de Gilbert

" Tu dois abandonner la vie que tu as planifiée pour pouvoir vivre la vie qui t'attend ", voilà encore une citation qui me semble faire écho à celle de Jean d'Ormesson. Celle-ci est de Joseph Campbell.

Il me semble que ces deux citations ont effectivement à voir avec le lâcher prise... " J'aurais voulu être un artiste " dit la chanson. Le problème avec ce type de pensée, c'est qu'on en oublie de vivre ce que l'on est vraiment. Il ne s'agit évidemment pas de laxisme mais d'accepter ses limites du moment pour pouvoir justement les repousser naturellement. C'est aussi ne pas faire de plans sur la comète... Mais être réceptif à ce qui nous est proposé. Ce n'est qu'une tentative de réponse Horia et je suis curieux de lire les commentaires de nos amis.

Portrait de Claire M. Psychanalyste

Bonjour Horia,

En ce qui me concerne, je comprendrais cette phrase de la manière suivante : le contrôle n’est pas dans la nature de l’être humain. Le petit enfant à la naissance ne contrôle rien. Il est, il est lui-­même , tout simplement. Le contrôle de ses instincts est  le fruit d’un long apprentissage  imposé par les parents tout d’abord puis par les aléas de la vie en société ensuite (ne pas se faire du mal à soi-même ou faire du mal à autrui  par exemple : l’enfant doit apprendre à traverser la route sans se mettre en danger ou à ne pas voler, etc., ou même faire plaisir à ses parents en rangeant sa chambre, bien travailler à l’école pour satisfaire ses parents, l’enseignant, etc.)Toutes ces injonctions que nous finissons par faire nôtres.

Le côté positif du contrôle est de prendre en compte certaines limites de la réalité : on peut contrôler ses instincts narcissiques et « asociaux » (« moi, moi, moi, que moi  et tout pour moi ») et ainsi s’intégrer dans sa famille puis la société. Mais le 2e effet du contrôle peut être beaucoup moins positif puisque si par apprentissage et à force de trop nombreuses injonctions, on s’impose de censurer de manière abusive ses instincts, on peut vivre en étant certes très attentif  aux autres, à la société, à leur regard etc. mais plus trop à soi-même ; car nos instincts sont ambivalents (comme le contrôle d’ailleurs ): ils peuvent inciter au pire (côté égoïste, narcissique) mais aussi au meilleur : ce sont les forces qui nous poussent sur notre chemin de vie individuel : c’est notre nature première,  notre personnalité innée, celle que l’on doit prendre en compte pour se réaliser : ce que nous aimons être , faire et vivre. C'est-à-dire que cet instinct, ces pulsions doivent pouvoir trouver une forme de liberté d’expression dans notre vie et être prises en compte pour pouvoir nous guider sur la voie pour rester soi-même, et donner le « bon » sens à  sa vie, celui que chaque personne pour soi peut lui donner en s’écoutant, se laissant aller (en respectant ce faisant ses limites et celles des autres ) . Je l’entendrais ici donc également comme une forme de lâcher-prise par rapport à un contrôle ou même un but dans la vie qui seraient premiers.  C’est la vie qui est première et il est bon de pouvoir la laisser jaillir librement parfois, sans but, juste pour le plaisir, comme on savait le faire quand on était enfant et insouciant, et souvent,  à force de trop de contrôle, on a oublié comment faire…… pour lâcher prise et juste vivre....

Peut être cette une lecture vous parlera-t-elle,  Horia.

Bon week-end.

Portrait de Isabelle

" Perdre tout contrôle " dans cette citation, très intéressante au demeurant, implique pour moi aussi, un lâcher-prise au bout du compte. Mais il me semble, que ce lâcher-prise se met en place aussi parce qu'en traversant les difficultés inhérantes à chacun, à chaque fois, il y a une petite part de "contrôle sur soi et/ou sur les autres" que nous sommes invités à "lâcher". Au travers des épreuves rencontrées, dans un premier temps, nous pouvons avoir des réactions "sans masque"... Cette part d'ombre dont je parle souvent, parce qu'à mon sens, il est important de l'apprivoiser et de l'accepter... Ces masques que nous portons tous, en lien à l'éducation "au sens large du terme" que nous avons reçue, qui nous a également permis de grandir, de nous construire, pour une part est aussi liée aux injonctions transgénérationnelles, entre autres... Face à l'épreuve, nous ne réagissons pas tous de la même façon, et pourtant, c'est sans doute là, que nous sommes aussi le plus nous-même... Pour certains, cela implique que la souffrance amènera de la colère ou un sentiment d'injustice ou de se sentir anéantis, par exemple... Ces réactions premières témoignent de ce que nous sommes et des possibilités qui sont en nous, en corollaires inversés... le lâcher-prise se mettra en place dans la mesure où nous prenons en compte ces réactions premières et "inversons la vapeur" parce que nous avons toujours la possibilité de mettre en avant notre combativité, pulsion de vie, en première intention... Le lâcher-prise viendra ensuite, comme une sorte de reconnaissance de soi-même, dans la mesure ou nous nous sommes "accordés" en rééquilibrant nos pulsions... C'est en ce sens que les épreuves sont nécessaires pour nous permettre d'avancer et d'évoluer, ce n'est absolument pas par masochisme... Mais aussi, parce qu'au fil de ces épreuves, nous lâchons ces aspects masochistes en lien là aussi, à la fidélité filiale qu'il nous incombe de lâcher... Pour nous protéger et permettre aux générations suivantes d'avancer un peu plus "librement" à leur tour... Je ne sais pas, si en définitive, j'ai réellement "abordé" la question proposée... Mais c'est la réflexion qu'elle m'a permise... Amitiés Horia

Portrait de Serge

Dans son ouvrge " Coaching méditatif " publié aux Editions Bussière, Alain Héril explique que le secret du lâcher-prise, c'est apprendre à lâcher le lâcher-prise... Voici la façon dont il l'explique :
" Ne pas chercher de résultat pré-établi, aussi somptueux soit-il dans le fantasme mais laisser surgir une dose d'inattendu"...
J'ai expérimenté ce conseil pour des évènements qui me hantaient... Cette méthode marche très bien aussi car, pour reprendre l'idée de la citation de Jean d'Ormesson, lorsqu'on est connecté à soi-même, et uniquement à soi-même, la moindre peur disparaît. La peur se nourrit du lien névrotique que nous établissons avec les autres, sans en avoir conscience. En fait, nous faisons des membres de notre entourage des censeurs et nous finissons par leur donner un pouvoir sur nous qu'ils n'avaient pas fondamentalement ! Allons au plus profond de notre Être, comme lorsque nous visitons une grotte souterraine, et nous n'aurons plus aucune phobie. La bonne nouvelle c'est qu'en agissant de la sorte nous désarmons ceux qui nous jugeaient par notre faute, et non à cause d'une faute puisque celle-ci n'existe pas...

Portrait de Horia

Excusez ma réaction mais je trouve vos réponses un peu trop intellectuelles pour moi...
Je comprends bien qu'il faut être en accord avec soi. Personnellement, j'ai l'impression de plutôt bien m'entendre avec moi : je suis responsable, j'assure mon boulot de mon mieux, mais j'ai un fils de 16 ans à problèmes et qui a tendance à avoir de mauvaises fréquentations et à faire des bêtises. À part quand il dort, je ne suis jamais tranquille, surtout quand il va traîner... J'aspire au calme intérieur, c'est sûr, mais comment y parvenir quand on est une maman inquiète à cause de son ado mineur ?

Portrait de Serge

Je comprends tout à fait votre désarroi qui est humain face au comportement de votre fils. Mais je me permets d'insister, c'est là qu'intervient l'intérêt du conseil d'Alain Héril : essayez de voir si, par exemple, votre fils vous fait honte par rapport à vos voisins ou à votre famille. Sans être devin, je suis quasiment sûr que c'est le cas. C'est cet aspect qu'il faut que vous lâchiez. Pour y arriver, centrez-vous et descendez jusqu'au plus profond de votre Être, strate où n'existe pas le jugement. En plus, cette excellente centration modifiera votre comportement extérieur et étant progressivement de moins en moins inquiète, votre fils en sera étonné et pourra commencer à réfléchir à ses fréquentations...

Portrait de Horia

Bien sûr que je vais essayer parce que je n'ai rien à perdre mais ça me semble plus facile à dire qu'à faire...

Portrait de Serge

Pour essayer d'y arriver, videz votre mental par rapport à votre fils : n'ayez plus d'attente quant à lui, qu'elle soit positive ou négative. Il est aussi redoutable d'attendre que votre ado devienne un grand avocat que d'imaginer qu'il finira par se laisser embarquer dans quelque galère sordide. Ne faites plus aucun plan sur lui. Si un après-midi il part de la maison, ne vous dites pas plus qu'il va retrouver des voyous que le petit voisin qui est bien rangé... Lâchez tout votre stress. Si cet exercice vous semble très difficile, répétez-vous autant de fois que nécessaire que les événements n'arrivent jamais comme nous les avions imaginés... Nous perdons non seulement notre temps mais notre santé à nous faire des scénarios... La seule chose dont nous soyons sûrs, c'est de ce qui se passe dans notre propre vie à l'instant " T ". Donc, fantasmer la vie des autres constitue une façon de s'autodétruire... Pour voir le bout du tunnel, il est indispensable que vous sortiez de vos croyances erronées qui reposent systématiquement sur des peurs de l'enfance...

Portrait de Gilbert

Il est fascinant et enthousiasmant de retrouver dans de nombreuses discussions cette fameuse force de l'instant présent où tout finalement se simplifie. Mais, comme le suggère Horia, qu'il est difficile d'être simple...  " Heureux, les simples d'esprit... " disait Jésus. Et il ne parlait certainement pas de débiles mentaux. Les arguments de Serge qui incintent à quitter l'enfance sont, à mon avis, imparables. Et c'est un travail de tous les instants. Merci à vous Horia d'avoir permis cette prise de conscience. Votre fils aussi vit l'instant présent... Laissez le lui et ne l'embarassez pas de vos inquiétudes ! Vous lui compliqueriez encore plus la vie... Smile

Portrait de Horia

Je suis contente parce qu'au travers des exemples que vous venez de prendre j'ai senti une paix en moi pendant 2 à 3 secondes... Ce n'est pas long mais ça veut peut-être dire que je commence à intégrer qu'avoir peur de la vie est inutile...
Je sais que vous comprenez très bien qu'à 16 ans, je ne peux pas interdire à mon fils d'aller faire un tour en ville avec ses copains, même si je ne les apprécie pas trop... Je vois bien que si je ne veux pas tomber malade, il ne faut ni que je rêve sa vie, ni que je la cauchemarde... Il faut que j'arrête aussi de me laisser influencer par ma chef. J'ai eu tort de lui confier que mon ado m'inquiétait. Elle a 58 ans, un fils unique qui est technicien automobile (il n'a quand même pas fait Polytechnique !). Elle passe son temps à me le citer en exemple et à me dire comme elle l'avait élevé... J'en ai marre de cette donneuse de leçons et dès lundi je vais mettre de la distance avec elle... D'autant que j'ai appris par une autre collègue que quand son fils était à l'école primaire, elle s'absentait de son travail pour l'emmener au cinéma le mercredi après-midi (elle était la maîtresse du chef de service de l'époque !). C'est sûr que je n'ai pas ce genre de mentalité...

Portrait de Serge

D'où l'intérêt de bien vous centrer aussi pour ne pas être tentée dorénavant de vous épancher sur des épaules qui vous font plus de mal que de bien... Le processus de centration permet de compter sur soi et d'éviter les trahisons... Et puis qui connaît mieux le problème que vous-même ? Donc qui peut véritablement vous aider ? Les forums présentent à l'inverse l'avantage que les personnes qui y participent ont le désir d'être en empathie et non pas de régler leurs comptes sur le dos de personnes fragilisées...

Portrait de Banana Kong

Bonjour à tous et à toutes,

Pour Horia,

Au moment où vous avez évoqué le comportement agaçant de votre chef, je n'ai pû m'empêcher de prendre part à la conversation. Sachez que les personnes qui font croire qu'elles sont "un réel exemple à suivre", sont en fait les dernières à suivre. Cette dame n'est pas bien dans sa peau et vous le fait comprendre en situant son enfant à un certain niveau qui se trouverait largement supérieur à votre enfant. En vous racontant ses exploits, elle n'attend qu'une chose : que vous vous sentiez plus mal qu'elle. Cela a l'air de fonctionner...