Je souffre beaucoup de mon caractère qui juge facilement. J'ai beau m'en défendre mais je sais que je juge. Notamment ma fille de 19 ans qui a des conduites et des comportements qui ne me conviennent pas. J'aimerais développer une neutralité face aux personnes qui me dérangent, en particulier quand elles agissent contrairement à mes valeurs ou aux valeurs symboliques. Je vous dis ça parce que je me suis encore disputée avec mon compagnon hier au sujet de ce guide qui a été assassiné en Algérie par des barbares. Quand j'ai dit à mon ami que cet homme avait pris des risques, qu'il était auto-destructeur, qu'il est allé se mettre dans la gueule du loup, qu'il y a suffisamment d'endroits magnifiques en France pour faire de la randonnée et des photos, mon ami est rentré dans une grosse colère. Il m'a dit que ne changerais jamais, qu'il fallait toujours que je m'oppose à tout systématiquement, que ce guide était un gars très bien de l'avis de tous... Je me suis tue car j'ai bien compris que déjà je ne m'étais pas bien fait entendre, vu que je n'ai jamais dit du mal de ce guide mais juste qu'il avait pris des risques et je vois bien aussi que je donne à mon entourage l'impression de voir le mal partout. Pourtant, quand j'ai demandé à mon ami s'il irait passer des vacances en Algérie en ce moment, il m'a dit que non! C'est donc bien que je n'ai pas tort sur tout.
Entre ma fille et la réaction virulente de mon compagnon, je ne sais plus trop où j'en suis.
Je voudrais donc arriver à m'adapter à tout le monde mais je n'y parviens pas.
Est ce que vous pouvez me conseiller?
Gilbert
Différence entre jugement et analyse
Bonsoir Nathalie,
Pour être en contact avec le milieu psy, j'ai appris qu'il existe une grande différence entre le jugement et l'analyse. Or, j'avoue que votre analyse de cette actualité tient objectivement la route. Et je suis de votre avis. Il est certain qu'au moins inconsciemment, ce guide s'est mis dans la gueule du loup, ce qui ne pose à aucun moment un déni sur l'horreur innomable de l'acte qui a été commis. On pourrait même y voir aussi un positionnement de nos gouvernants et des medias discutables, mais je n'ai aucunement le désir de déclencher une discussion de cet ordre là qui serait stérile car laissant libre court aux affects. En ce qui me concerne, je donne mon avis lorsqu'on me le demande quitte à générer des malaises. A l'inverse, je prends en compte la personne qui est en face de moi. Les psys, par exemple, évaluent la maturité pulsionnelle d'un patient avant d'asséner une interprétation qui ne serait pas entendue.
Pour en revenir à la différence entre analyse et jugement. Le jugement me paraît essentiellement projectif. Il ne sert qu'à se débarasser d'une problématique qui nous dérange intérieurement. C'est la cas du racisme par exemple. Le jugement génère toujours un conflit car il se situe à partir d'une position de dominant. Il s'agit d'avoir absolument raison pour soumettre autrui. L'analyse est partage dans la mesure où elle laisse une grande place à la communication. Mais encore faut-il que les deux interlocuteurs soient sur la même longueur d'onde, ce qui est assez rare. D'où l'intérêt d'être prudent selon le sujet de conversation.
Sofia M
La liberté du dialogue intérieur
Effectivement, Freud a apporté une nuance fondamentale entre juger et analyser :
. Un jugement est " gratuit " dans le sens où il ne repose sur aucun principe de réalité. Je prends un exemple. Supposons que je n'aime pas ma voisine et que je raconte qu'elle trompe son mari, alors qu'aucune objectivation ne va dans ce sens : c'est un jugement projectif, ce qui constitue d'ailleurs un pléonasme. C'est ainsi que naît la rumeur...
. Une analyse repose, à l'inverse, sur la démonstration possible de ce que l'on avance, c'est-à-dire la preuve vérifiable par le plus grand nombre. Ce qui est malheureusement le cas pour ce randonneur qui a perdu la vie en Algérie...
Vient alors cette grande question : comment s'adapter à tout le monde ?
Il ne s'agit pas de devenir des béni-oui-oui, comme nous y invite la société dans laquelle nous évoluons (ou involuons ??? !!!)... Mais, comme le suggère Gilbert, à chacun d'être suffisamment adulte pour ne pas aborder certains sujets en fonction de la position d'un interlocuteur que l'on sait rigide. Du reste, cette attitude raisonnable fait partie des règles de savoir-vivre, notamment à table où il faut éviter de parler de religion et de politique si l'on désire que le repas ne se termine pas en discussions violentes, dans un brouhaha qui aboutit à de l'incorrection et à des fâcheries qui peuvent devenir durables ou définitives. En fait, nous connaissons les réactions de notre interlocuteur, donc mieux vaut garder pour soi ce qui peut déclencher des incompréhensions et autres mésententes. Et, encore une fois, quand nous ne connaissons pas suffisamment notre interlocuteur, mieux vaut s'abstenir quant à lancer certains sujets de conversation ! Fort heureusement, nous avons la chance de pouvoir penser librement, sans troubler personne. En ce qui me concerne et comme j'ai un caractère bien trempé, c'est comme ça que je fonctionne : finalement, mes dialogues intérieurs - du Je au Moi - me sont beaucoup plus profitables que d'évoquer certains thèmes que mes interlocuteurs ne pourront ni entendre ni supporter.
Nathalie-196
Réfléchir avant de parler!
C'est sûr que vos commentaires me rappellent qu'il faut que j'apprenne à tourner ma langue dans ma bouche avant de parler!
Il faut que je travaille à acquérir cette sagesse si je ne veux plus continuer à me pourrir la vie comme je le fais depuis toujours... Je me mets en marche tout de suite et je sais que je vais m'y tenir parce que j'ai laissé trop de plumes dans des discussions ces temps ci et que je me sens de plus en plus vidée...