La nécessité de transmettre !

Portrait de Juliette

Ce matin j'ai lu dans la Bible ce verset : "Le juste poussera comme le palmier, il grandira comme le cèdre du Liban" (Psaume 92, 13), et une interprétation du Maguid de Mezeritch, du mouvement hassidique : Il y a deux sortes de Justes. Les uns portent des fruits qui profitent à l'humanité, comme le palmier, les autres étudient égoïstement pour eux-mêmes. Ils sont orgueilleux et stériles comme le cèdre.

Que pensez-vous de la nécessité de transmettre, que tout savoir n'a pas été acquis pour soi mais pour l'autre ?

Portrait de Jean

Il y a dans votre sujet de discussion toute la différence entre un enseignement et une transmission. On peut acquérir un savoir et effectivement le garder jalousement pour soi. J'ai connu un professeur de guitare qui fonctionnait de cette manière. Il ne livrait pas ses " trucs ", ses " astuces "... Il y a aussi ceux qui ne s'engagent pas pour confronter leur savoir, ce qu'il fait qu'il reste " livresque " et inapplicable au quotidien. Dans une chanson écrite par un ami, le texte dit " L'homme au dictionnaire, il fait semblant d'avoir des idées et il sourit pour te détruire... ". Oui, il y a un certain orgueil, à mon avis, à engranger des connaissances rien que pour soi. Peut-être aussi la peur d'être jugé, évalué, remis en question. Mais la véritable Connaissance doit être vivante tout comme la spiritualité. Merci Juliette pour ce très beau texte des Psaumes...

Portrait de Ugo

Transmaitre est à mon sens une restitution de nos acquis simplifiés, c'est à dire qui permettront à un autre que soi d'aller plus loin que là oú nous avons pu aller. Transmettre la co-naissance des connaissances non pas pour ce qu'elles sont mais pour ce qu'elles contibuent à une évolution positive de l'humanité...

Portrait de Igor.P

Votre post me renvoie à mes études de menuiserie ébénisterie. J'avais la chance d'être avec un prof d'une grande sagesse qui en début de formation nous a dit ceci : " ce que je vais m'efforcer de vous transmettre est le fruit de mes connaissances et de mon expérience. Mon point d'arrivée sera votre point de départ. C'est ce qui donnera du sens à votre parcours et au mien, apprendre pour apprendre n'a aucun intérêt . le sens est de continuer ce que d'autres ont déjà commencé ". Merci pour ce sujet intéressant qui me permet de me rappeler au bon souvenir de mon prof  ( oú devrais je dire alors de mon maître !) parceque il y a certains jours oú j'ai tendanec à oublier le sens de ce qui m'a été je pense transmis.

Portrait de cricri

Je suis d'accord et pas d'accord avec vous ! Il est bien évident que si l'être humain est doté de la parole, c'est pour qu'il transmettre a priori de façon qualitative, cas auquel c'est un devoir. En revanche et bien que ne voulant surtout pas m'opposer à la Bible - mais là il s'agit d'une discussion
en 2014 où la communication et ses moyens de transmission a quelque peu évolué -, je ne pense
pas que certains " étudient pour eux-mêmes " et qu'ils soient " orgueilleux et stériles comme le
cèdre ", car une personne qui étudie, qui fait un travail sur soi, ça se voit, ça transpire toujours d'une façon ou d'une autre... Ils transmettent peut-être silencieusement ceux qui étudient pour eux-
mêmes mais ils transmettent à leur manière... Ils dégagent ce qui déborde de la coupe et ce qui déborde de la coupe, nous sommes libres de nous l'approprier ou pas. Je me souviens d'une
présentatrice du Journal télévisé il y a une vingtaine d'années. Psychorigide, elle n'était pas très brillante dans l'exercice de sa profession, et d'ailleurs elle n'est pas restée très longtemps à ce
poste, mais elle donnait l'impression d'être très centrée sur elle. Certains auraient même pu penser : " trop " centrée sur elle... Mais, cette jeune femme, bien que je ne la connaisse pas m'a fait avoir
une prise de conscience : je courais dans tous les sens à cette époque, entre mon travail, le bénévolat et les enfants. Son message inconscient à elle, ça a été de me dire : " Calme-toi ma fille
et recentre-toi sur toi "... Je n'ai jamais oublié cette présentatrice et quand je m'agite trop, je pense automatiquement à elle... J'ai pris cet exemple parce que, malgré ses études journalistiques selon lesquelles elle ne pouvait pas transmettre directement son savoir, elle m'a donné - sans me connaître - une leçon de vie et de santé que j'utilise donc toujours...

Portrait de Cécile. G.. Psychanalyste

Merci Cricri de rappeler que la transmission bien que de tradition orale peut aussi se faire par l'exemple et malgré soi.

Portrait de Gilbert

Dans un premier élan, j'aurai eu tendance à avoir un avis tranché, un peu comme Jean. Mais à suivre la discussion, je me dis que le cèdre du Liban a sa raison d'être aussi. D'ailleurs le psaume dit bien " "Le juste poussera comme le palmier, il grandira comme le cèdre du Liban ". J'ai du mal à saisir l'interprétation de
Maguid de Mezeritch qui décrête qu'il y a deux sortes de " Justes "... Moi, je suis basique et certainement pas aussi érudit. Mais il me semble que soit on est Juste, soit on n'est pas Juste. Certes je comprends la nuance, mais quand même... Je n'étais pas très à l'aise avec cette interprétation. Ou alors, elle mérite d'être étayée par des exemples concrets. C'est le problème des citations sorties d'un contexte. En tous cas, une discussion très intéressante. J'ai en mémoire un maître Yogi, Swami Satyananda. Il a parcouru le monde, donnant des conférences pendant des années. Puis, un jour, il a décidé de se retirer du monde. Seul un ou deux disciples savaient où il était. Il disait qu'il transmettait autrement, sans bouger, en état de méditation au fin fond de l'Himalaya. Comme le suggère Cricri, parfois il faut savoir se calmer et se recentrer sur soi... Pour mieux donner ce qui déborde. Et puis, de la frustration naît le désir... Cette phrase a été souvent évoqué ici !

Portrait de Juliette

Est-ce à dire qu'il y a deux temps dans la vie. Une phase fruitière, de partage et de transmission directe et une phase stérile, une transmission indirecte, par l'exemple. Nous apprenons puis nous devenons un palmier fruitier qui nourrit de ses fruits l'autre et devenons ensuite un cèdre, stérile, et c'est à l'autre de venir chercher ce dont il a besoin. Comme si le palmier était le symbole d'une phase active et le cèdre le symbole de la phase inactive, de retraite, de sagesse qui montre l'exemple.

Portrait de Viviane

Un sujet de discussion très intéressant ! Mais je ne peux m'empêcher d'y aller de mon petit regard plus "nature", au sujet du cèdre en tant que tel... Parce que si j'observe cet arbre plus particulièrement... Il renvoie (mais ce n'est que mon ressenti) une force et une sagesse, et je dirais même une "majesté" à mon sens assez impressionnante en soi... Mais peut être que c'est dû aussi au fait, que le cèdre est un arbre qui peut devenir plusieurs fois centenaire, voire pour celui du Liban plus particulièrement, même millénaire. Pour m'être trouvée dans différents lieux où il y en avait plusieurs et visiblement d'un "âge" déjà très respectable... Il y a véritablement une sensation de quiétude et d'apaisement à leurs "présences"... Mais vous allez sans doute penser que je "délire"... Tout ça pour dire, que je crois effectivement, que même en observant la nature, on retrouve bien ces deux aspects actif-passif d'une forme de transmission en soi... Du coup ça m'a permis de réfléchir aussi aux "formes" les plus "avancées" de transmission avec Le Christ, Bouddha pour ne citer que ceux-là... Et il me semble, à un niveau très élevé bien sûr, que ce rythme est le même aussi...

Portrait de Juliette

En vous lisant Viviane, je réalise que j'ai utilisé le terme 'inactif" pour le cèdre alors que je voulais mettre "passif", ce qui n'est pas la même chose. Merci Viviane d'avoir réctifié !Wink 

Portrait de Viviane

C'est moi qui vous dit merci, par le sujet de discussion que vous proposez, et je suis sincère ! Parce qu'il soulève bien des questions en moi aussi... Je pensais justement aux aspects plus passifs des individus qui font ce choix d'une activité dans la prière en lieu fermé, juste en communauté (en dehors de tout aspect "sectaire")... Parce qu'au fond, on pourrait tout autant dire que ceux-là ne transmettent pas...

Portrait de Jean

Le cèdre du Liban et sa description par Viviane, ainsi que tous vos posts, m'ont bien fait avancer dans ma réflexion. Je pense effectivement à toutes ces monialies et à tous ces moines anonymes, silencieux, qui étudient tous les jours dans leur monastère et leur couvent. L'Eglise les appelle les contemplatifs, par opposition ou en complémentarité des clercs engagés dans le monde. Leur force, la prière, anonyme mais tout aussi puissante que les actions concrètes... Merci à vous tous !