À partir de quel moment dit-on du mal d'une personne ?

Portrait de luna_95

Je crois que Bénir (bénédiction) signifie Dire du bien...

Les religions nous rappellent sempiternellement la nécessité absolue de ne pas critiquer et de voir le bon côté des êtres. Comme une sorte de voie royale pour que cessent nos soucis, nos angoisses...

Intellectuellement, je comprends cette position mais lorsque je fais le bilan de mes journées, je constate combien de fois j'ai été négative vis-à-vis de plusieurs de mes prochains... Ceci dit et sans vouloir m'accorder de circonstances atténuantes, j'ai tout de même de grandes difficultés à évaluer à partir de quel moment je critique. Si je prends l'exemple du travail, on ne peut pas laisser passer des comportements paresseux ou désorganisés. Donc, on peut être amené à en parler. Pour la famille, j'ai la même interrogation : si un membre de ma famille se comporte mal (certes à mon sens), j'en parle avec mon mari... 

C'est vrai que j'aimerais ne jamais relever ce qui ne va pas chez les autres mais je n'y arrive pas. D'abord, il faut que ça sorte parce que ça m'étouffe. Ensuite, en ne disant pas ce qui me semble dysfonctionner chez quelqu'un, j'aurais le sentiment de cautionner des attitudes très discutables...

Je suis un peu perdue avec ce sujet. Est-ce que vous pourriez m'aider à agir dans le sens d'une spiritualité louable ? Autrement présenté, je me demande - et je me permets de vous demander - s'il est réellement possible de ne jamais critiquer et de ne s'arrêter que sur les belles qualités d'un interlocuteur, quel qu'il soit, qui nous dérange ? Nos jugements ne sont-ils véritablement que des projections parce que là encore, j'ai du mal avec ce processus dont nous pouvons être accusés facilement ?

Merci de vos réponses.

Luna

Portrait de Gilbert

J'ai le même questionnement que vous luna-95, et je le trouve très légitime, surtout lorsqu'on s'interroge spirituellement. Je voudrais d'abord passer par un Symbolique que tout le monde connaît, enfin si on s'intéresse aux Evangiles qui retracent les paroles de Jésus. Voilà un homme qui, pour moi, ne jugeait pas. Ce qui ne veut pas dire qu'il laissait dire et faire n'importe quoi. Il n'avait tellement pas sa langue dans sa poche qu'on a essayé de le faire taire. Mais il continue à nous parler, deux mille ans après sa crucifixion.

Je crois que l'on critique dans le mauvais sens du terme lorsqu'on veut, consciemment ou inconsciemment, du mal à la personne que l'on vise. J'ai discuté souvent de ce sujet avec mes amis psys. Ils font une différence essentielle entre la critique et l'analyse. Si j'ai bien compris ce qu'ils veulent dire, la critique reste subjective, alors que l'analyse se veut objective. C'est-à-dire qu'elle tient compte du principe de réalité. De plus on analyse un acte qui dysfonctionne et on critique une personne. Je crois que cette notion est importante aussi.  Ne pas critiquer un employé qui ne fait pas son travail, ce n'est pas vraiment lui rendre service mais c'est aussi mettre en danger l'entreprise. Ensuite, tout est dans la manière de le faire. Il n'est pas question d'abîmer. Jésus a chassé les marchands du Temple car ils pensaient que là n'étaient pas leur place et qu'ils faisaient du tort à la " Maison de son Père ".

Dans la société, quelqu'un qui fait un cambriolage est un voleur et doit à mon sens être traité comme tel. Celui qui tue est un tueur. Il faut quand même appeler un chat un chat et un voleur un voleur. La vie en commun nécessite des règles et lorsqu'il y a transgression, il ya transgression. Comprendre est un chose (analyse), excusez en est une autre (jugement à l'envers).

Dans une famille, si un enfant mineur dysfonctionne, il n'est pas question de fermer les yeux. Le rôle et la fonction des parents n'est certainement pas d'avaliser un comportement hors la loi : (drogue, violence, etc...). Non seulement ils protègent leur enfant mais ils protègent aussi la société. Une attitude béni-oui-oui et laxiste est en fait très violente : " Qui ne dit rien consent ! ". On peut remettre à sa place un enfant, un élève, un employé, avec beaucoup d'amour me semble-t-il. Je n'en suis pas là et suis conscient que j'ai fait beaucoup d'erreurs dans ma vie en confondant critique et analyse de la situation. J'espère cependant avoir un peu progresser et surtout continuer encore. Dire du bien (bénir) ne consiste pas à faire l'autruche sur le mal. Et tout être porte en lui les deux aspects - et moi le premier -.

Je laisse des internautes plus pertinents que moi m'enseigner aussi sur ce sujet très important. On a trop tendance, à mon sens, et aussi dans développement personnel à tout acccepter, ce qui relève à mon sens d'une fausse acceptation, dans la mesure où - en fait - on a surtout peur de faire des vagues. Une mauvaise indifférence en quelque sorte, sous couvert d'un hypocrite " tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ! ". Merci de m'avoir lu et corrigez-moi si vous trouvez quelque chose de faux. Je vous en suis reconnaissant par avance !

Gilbert

Portrait de Charles

Il m'est arrivé de me poser cette question. Je pense être quelqu'un de relativement entier. Aussi, j'ai du faire des erreurs au niveau communication et bléssé des gens alors que ce n'était pas ma volonté (en tout cas au conscient puisqu'en lisant des posts en psys, j'ai compris que nous avons un inconscient qui tirait souvent les ficelles). Je voudrais seulement préciser que j'essaie de ne pas cautionner quelque chose qui me paraît injuste. Cela m'a vallu des amis en moins. Mais était-ce de véritables amis ? Je crois que qu'il est important de donner notre avis, sans fard, lorsqu'il nous est demandé. Mon problème, c'est que je ne sais pas trop y mettre les formes. Mais chaque fois que j'ai cautionné ou  " tu " ce que je pensais, je n'étais pas bien. Dire du bien de tout le monde, un certain animateur le fait à la télé. c'est vrai qu'il est aimé de la majorité, mais ce n'est pas ma façon de voir les choses. Rester intégre tout en ne faisant pas d'erreur de communication, voilà ce que j'aimerais réaliser. aussi, je suivrai cette discuqqion avec intérêt. Pardonnez-moi car je découvre sur ce forum l'importance de la spiritualité, mais je suis un grand néophyte. Mais on m'a dit qu'à 40 ans (j'en ai 41), c'est en général l'âge ou on se pose des questions ontologiques. Alors, j'espère trouver aussi des réponses ici - entre autres. Bonne journée !

Portrait de Isabelle M.

Une question qui me semble d'une grande importance ! Ne serait-ce que parce qu'elle me pousse à m'interroger moi-même sur les limites à ne pas dépasser déjà... Et qu'il m'arrive de douter, sur le bien fondé de mon dire ! Je dirais que cette idée de "dire du mal" revient alors à s'exprimer par un sadisme oral qui alimentera par "répercussion" un état anal tout autant destructeur ... Si l'on dit du mal, on projette sur "l'autre" vécu comme agresseur, ce qui est insupportable pour soi... A la différence, de dire ce qui est mal, c'est-à-dire sur un "positionnement potentiellement destructeur que l'autre met en place". A ce moment-là, c'est une limite que l'on pose à l'autre, pour "protéger". Pour soi, dans le sens on l'on dit qu'on ne cautionne pas une mise en danger et pour "l'autre", puisqu'on pose une limite pour l'autre... Qu'il est d'ailleurs libre d'accepter ou pas...

Je discutais tôt ce matin avec le père de mon fils aîné... Qui s'est souvent "amusé" depuis qu'il est enfant, à "me faire peur", en touchant mes affects en lien à mon histoire, en particulier par le décès de mon jeune frère... Il y a quelque mois, pour l'anniversaire de mon petit-fils (3 ans), et j'étais venue en témoigner, j'avais refusé de participer à "l'enveloppe commune" pour l'achat d'un quad... Pour moi c'était réellement "cautionner" une mise en danger potentielle trop lourde de conséquences... ce que j'avais d'ailleurs clairement verbalisé... (J'ai opter pour l'achat d'un panneau de basket, pour jouer dans la cour). Même si cet exemple est un peu "décalé"... J'ai "pris" le risque qu'en définitive ce soit reçu par mon fils et ma belle-fille, comme de ma part "dire du mal" de leurs choix... Y compris qu'ensuite, on peut alors très rapidement "glisser" sur des "règlements de compte familiaux" en tous genres... Sauf, que si effectivement, mon positionnement est juste à la base, c'est-à-dire qu'il ne soit pas qu'une projection de ma part... Ce sera vérifiable par la suite... Il se trouve que mon fils et ma belle-fille, ont acheté une berline confortable, quelques semaines après l'acquisition du quad pour mon petit-fils... Mais ce à quoi mon fils n'a pas "réfléchis" lors de l'achat de ce véhicule, c'est que cette voiture malgré la grande malle, n'a pas de haillon... Et donc, impossible de transporter le quad trop gros pour "rentrer" dans la male de la voiture... Le quad n'est donc utilisable pour mon petit-fils, que sur une portion de terrain très restreinte, qui limite très considérablement une mise en danger... Et d'ailleurs, le quad qui plaisait "beaucoup" à mon petit-fils, dans un premier temps, en définitive est presque déjà "passer aux oubliettes"...

Mon post est sûrement maladroit, développé ainsi... Mais vôtre question Luna "m'a encouragée" ce matin à "mieux réfléchir" à la différence entre "médisance" et "dire protecteur"...

Portrait de Gilbert

J'ai beaucoup apprécié votre post, Isabelle, et la nuance que vous faites entre " dire du mal " et " dire ce qui est mal ". Il me semble que c'est le positionnement de Jésus. Il faisait justement la part du Bien et du Mal, puis libre à chacun de faire son propre choix. Ce qui n'empêche qu'il ne jugeait pas la personne mais l'acte. Son " intégrité ", comme le suggère Charles se situe bien là. Il s'agit de ne pas cautionner ce qui est -objectivement - mal. Le vol, par exemple, est de cet ordre.

Votre exemple par rapport au quad de vore petit fils n'est pas décalé du tout. Je peux vous donner l'exemple de mon propre fils aîné. Pour son anniversaire, des amis lui ont offert un saut en parachute et m'avaient demandé de partciper. Ce que j'ai refusé car je ne voulais pas prendre la responsabilité d'un accident. Au final, mon fils a eu un accident de travail et ne pourra certainement pas effectué ce saut. Un mal pour un bien, peut-être ?

Oui, je crois qu'il est important de se positionner et d'"analyser ", comme disent les psys. Mais l'analyse doit être suivi d'une prise de position, d'un choix. Et peu importe si l'on est pas le présentateur préféré des Français. L'hypocrisie est une mise en scène disait le prêtre à une homélie ce matin dans la messe du " Jour du Seigneur ". Ne pas jouer la comédie, continue-t-il. Et nous avons souvent - moi encore le premier - du " mal " à être authentique. Dire ce que l'on pense n'est pas nécessairement  " odieux " mais parfois en accord avec " Ho Dieu "....

Portrait de Isabelle M.

C'est gentil à vous Gilbert. Mais ce qui est toujours justement difficile quand même... C'est que je suis à des milliards d'années lumières d'être dans l'Amour Génital du Christ... Celà dit, je crois que j'arrive de temps en temps, en avançant... à "vérifier" que certaines fois, je n'ai pas nécessairement "tout faux" en disant... Et surtout qu'alors je n'ai pas dit pour "abîmer" mais bien pour "protéger"... Mais "toutes vérités n'est pas bonne à dire" reste encore une question d'un équilibre très "fragile" en moi... L'exemple que j'ai mis en avant, m'a poussé à dire et à me positionner, parce que pour moi c'était un peu "comme un état d'urgence"... Mais j'ai malheureusement bien conscience que cette "sorte d'état d'urgence qui pousse à réagir dans le bon sens", devrait devenir "un réflexe, un automatisme", que je suis loin pour l'instant de développer tous les jours... et encore moins à chaque instant...

Portrait de Gilbert. R. Psychanalyste

Il existe une position inconsciente que l'on évoque dans un cursus psychanalytique que nous nommons dans notre jargon " hystérie de séduction ". Pour faire simple, elle correspond un peu à la position d'un " béni-oui-oui " du style tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. Le bénéfice illusoire consiste à croire que tout le monde nous aime. Le problème, c'est qu'aucun engagement, aucun choix n'est véritablement possible. C'est l'illusoire pouvoir de la séduction. Pour remettre ceci dans un contexte spirituel, c'est la position de Satan (ou Maya, l'illusion en Inde). Le fantasme que tout est posssible se situe aussi à ce niveau-là avec le danger d'une dangereuse régression psychique toujours à la clé. Or, Satan, c'est quand même l'ange déçu (lapsus révélateur ! je voulais écrire bien sûr " déchu " !), l'ange du Mal. Il ne s'agit donc pas de juger, de critiquer, mais bien de faire preuve de discernement et de renoncer au Mal pour le Bien. Une question de différence donc, sachant que le mal se situe en nous aussi et qu'il s'agit de l'identifier d'abord chez nous avant de le projeter sur d'autres. C'est tout le travail d'une cure analytique, qui, comme le dit un foromer, ne juge pas mais analyse...

Portrait de M.Christine

D'accord avec GilbertR. psy : prendre garde à ne pas se faire du mal à soi-même en pensant du mal des autres .

Les pensées négatives sont de l'auto-empoisonnement qui réduit l'immunité dans le corps .

Pour autant, il ne s'agit, ni de voir tout le monde en rose ni de se taire . La sagesse en nous saura trouver l'équilibre ...

Portrait de Cécile

Je suis d'accord avec cette expression (" voir tout le monde en rose ") employée par M. Christine. Tout n'est pas parfait et il me semble important de le dire lorsque c'est nécessaire pour soi et pour autrui. Faire l'autruche peut être effectivement dangereux.

Portrait de Orlan

Vos commentaires sont tellement complets que je ne trouve pas grand-chose à y ajouter. Sauf peut-être que lorsqu'on est angoissé par un sujet, il faut savoir en parler avec un interlocuteur concerné par cette même problématique mais pas fatalement en présence de la personne qui nous angoisse. Je vais essayer d'illustrer ce que je viens d'énoncer en parlant de mon fils qui est un ado très paresseux.

Même si j'avance en spiritualité grâce à lui (eh oui !), même si je ne suis plus le très grand angoissé de service que j'étais il y a encore deux ou trois ans, l'avenir professionnel de mon fiston m'inquiète de façon récurrente. Aussi, je suis " heureux " de pouvoir en parler avec ma femme, non pas pour dire du mal de notre fils mais pour essayer de se positionner au mieux vis-à-vis de lui. Nos échanges sont toujours très constructifs et, objectivement, nous avons beaucoup amélioré la communication avec lui car, justement, c'est ce qui permet de ne pas l'abîmer par des paroles intempestives. Finalement, c'est une manière de faire le point régulièrement et de ne pas exploser comme il peut arriver de le faire quand la coupe est trop pleine...

Portrait de luna_95

Il y a beaucoup de discernements et de nuances dans vos commentaires et, bien qu'il faudra que je me repenche dessus pour les intégrer, je sais qu'ils vont déjà me rendre service, déjà en ne paniquant plus ni en culpabilisant quand j'émettrai dorénavant un sentiment, voire un ressentiment...