Peut-on se réconcilier avec soi-même ?

Portrait de Mireille-cogolin

Quand je vois ma sœur projeter ses colères sur son entourage et en particulier sur moi, je me dis qu'elle est certainement en profond désaccord avec elle-même...

Il paraît qu'on peut se réconcilier avec soi-même. Est-ce que vous savez comment ?

Portrait de Ugo

Bonjour Mireille, je pense que votre soeur doit effectivement beaucoup souffrir pour projeter son mal-être sur l'extérieur. Cette après-midi j'ai entrepris la lecture d'un livre du philosophe Alexandre Jollien, handicapé de naissance, qui s'intitule : " Vivre sans pourquoi ". Le sujet est en lien avec votre question. Je ne suis qu'au début de cet ouvrage dans lequel Alexandre Jollien parle de la difficulté qu'il a eu et qu'il a encore parfois à s'accepter tel qu'il est, avec son handicap. Pour lui, vivre sans pourquoi c'est quitter la dictature de l'après, se détacher du poids du qu'en-dira-t-on, ne plus lutter contre les évidences de la vie... Dans un des chapître nomé " Guérir de l'idée de guérir " il dit ceci : " S'il fallait tordre le cou à des adversaires c'est sur eux que je m'acharnerais: l'ennui, la lassitude, le manque, l'insatisfaction... poussés à leur paroxysme. Ils me jettent certains jours dans un état où je n'ai d'autre choix que de m'écrier : j'en ai marre de moi-même. C'est déjà un progrès : cesser d'accuser le monde de son mal-être. Sortir des cercles vicieux, rompre avec les habitudes et cet insatiable besoin de consolation. Je commence à comprendre qu'aucun docteur ne pourra me guérir. Et peu à peu, je guéris de l'idée de guérir. "
N'étant pas psy, je vous apporte juste ce lien. Les psys du forum viendront certainement apporter un éclairage plus pro.

Portrait de Gilbert. R. Psychanalyste

Pour avoir lu et écouté certains des propos d'Alexandre Jollien, son expérience colle assez bien avec le travail sur soi que propose la Psychanalyse. En effet, il ne s'agit pas de " guérir de la vie " mais de mettre en place une dialectique entre conscient et inconscient de manière à harmoniser le psychisme. Harmonisation qui préserve des manifestations agressives sans fondement dont semble faire preuve votre soeur. Oui, je pense qu'il est possible de mettre en place quelque chose qui ressemble à de la réconciliation avec soi-même. La Psychanalyse est une possibilité mais certainement pas la seule. Je crois qu'Alexandre Jollien passe par la philosophie appliquée mais aussi par sa Foi chrétienne et par des techniques de méditation issues du Zen. A chacun son chemin, mais encore faut-il commencer à ne plus accuser les autres de son mal-être. Ce qui demande un minimum d'interrogation, et qui n'a pas l'air d'être le cas, pour le moment, de votre soeur.

Considérez-là effectivement comme quelqu'un en grande souffrance, mais qu'il ne vous appartient pas de guérir. Elle reste libre d'accepter ou de refuser les mains qui se tendent, mais il est inutile de se lamenter sur elle de trop. Je sais que vous êtes croyante. Essayez de confier cette difficulté à Dieu et il vous enverra certainement des signes ponctuels quant à votre positionnement. Et peut-être même qu'un jour un déclic se fera.

J'ai essayé d'aider, il y a quelque temps, une personne désocialiée, sans revenu, avec une pathologie lourde et ce, bénévolement. Cela a duré quelques temps puis, ce monsieur n'a pas supporté certaines interprétations (devenant agressif) et a zappé notre dernier rendez-vous téléphonique. Je savais que j'avais atteint mes limites ! Six mois se sont écoulés depuis. Il y a quelques jours (ayant fait une croix dessus) j'ai été très surpris de recevoir un appel de cet homme, me demandant si j'acceptais de reprendre le travail avec lui, me disant qu'il ne se sentait pas prêt à l'époque.... Je lui ai répondu que, vu mon emploi du temps, ce n'était plus possible jusqu'en juillet. Le jour même, j'ai un appel d'une collègue spécialisée dans cette pathologie. Ce qui me conforte, entre parenthèse, dans le fait que le hasard n'existe pas ! Je lui parle de ce singulier patient et à ma grande surprise, elle accepte de prendre le relais, tout aussi bénévolement... Ce patient, malgré sa très lourde dépendance et souffrance, est croyant. S'excusant et se confondant en remerciements, il m'avoua qu'il considérait cette deuxième chance telle " une grâce divine "... Et je le pense aussi... Puisque je suis croyant !

Bien à vous !

Portrait de Sofia M

Se réconcilier avec soi-même est bien entendu possible mais à condition d'en avoir le désir... En revanche, la base du travail, si elle nous est indiquée par les souffrances de l'existence, n'est pas simple pour autant. En général, héritage judéo-chrétien oblige, on lance le processus de guérison en visitant et en revisitant sans cesse sa culpabilité, et on en fait même des tonnes ! C'est ce fameux Pourquoi, qui permet d'essayer de comprendre et dont parle Ugo mais qui est, quoi qu'il en soit, un passage obligé même s'il n'est pas suffisamment libérateur. Ensuite s'impose le Comment... sortir de là ? Et c'est là où le bât blesse car, si un certain nombre de situations nous offrent un heureux dénouement, d'autres résistent et ce, parfois pendant des années et c'est à ce point précis qu'intervient la notion de réconciliation avec soi-même : l'acceptation mais sans peurs, sans angoisses... Quelques rares heureux élus en sont gratifiés dès lors qu'ils acceptent d'accepter... D'autres, beaucoup plus nombreux et dont je fais partie, acceptent d'accepter mais gardent au fond d'eux une anxiété latente : cet état inconfortable, et incompréhensible pour soi, demande de passer par des apprentissages récurrents (psychanalyse, spiritualités, méditation, prières, interrogations plurielles...)... Ceci dit, si ce mal-être est très désagréable, il n'y a pas d'autre choix que celui de se dire qu'il s'agit de notre chemin de vie et que tant qu'il en sera ainsi, c'est que nous avons une humilité essentielle à développer... Tous les jours je pense à mes propres résistances qui me poussent à faire un énorme travail d'introspection mais je me dis que l'important, c'est que j'essaie de transmettre et de partager au mieux les évidences que j'ai trouvées sur ma route, telles des récompenses... Tout ça pour dire que votre sœur est loin d'en être là. Ce qui me semble primordial c'est tout ce travail que vous faites sur vous et qui un jour peut la toucher au point de s'identifier à vous... Mais vous savez que le Christ a dit que " nul n'est prophète en son pays "... Donc le plus sage consiste à ne surtout pas attendre qu'elle change... Vous faites profiter des tas de foromers de vos expériences et c'est tout aussi important...

Portrait de Mireille-cogolin

J'aime bien cette idée de se comporter au mieux pour qu'éventuellement certaines personnes de notre entourage aient envie d'en faire autant... 

En lisant vos commentaires, je sais que je suis encore loin du résultat que j'aimerais atteindre tant je souffre de mes angoisses... Par contre, en venant beaucoup sur tous ces forums, je commence à bien ressentir que l'essentiel c'est de chercher à avancer pour le mieux, de faire de nos peurs un moteur, pour contribuer à donner du courage à ceux qui en ont besoin et qui cherchent des solutions pour tenter d'alléger leurs souffrances... J'espère qu'un jour ma sœur finira par régler ce qui la gêne en elle et qui pollue tout ses proches...