Pour vous, c'est quoi, c'est qui, le diable ?

Portrait de Gilbert

Dans les religions, on parle de ce fameux diable dont il faut se méfier. Dans mon imaginaire religieux enfantin, ce personnage, nommé Satan ou Lucifer, avait quelque chose d'effrayant. L'imagerie collective le représente présidant aux flammes de l'enfer... De quoi foutre une sacrée trouille !  Certaines prédications religieuses issues du protestantisme en font un ennemi " diabolique " qui veut délibérément notre perte. De fait, je comprends que l'on puisse rejeter en vrac la religion... J'avoue que j'y ai été " tenté "...

J'ai toujours eu peur des serpents et on retrouve ce fameux serpent dans la Bible. Depuis, j'ai découvert les religions orientales et ce fameux terrible Satan serait plutôt apparenté à l'illusion (Maya). On retrouve cela dans le Bouddhisme.

Maturité aidant, je pense que notre démon est intérieur et prend des formes subtiles. Il s'agit de discerner le bien du mal, vaste sujet. Pourtant Mâ Ananda Moyï enseigne que Tout est Dieu, le diable aussi par la même occasion. Je sais que la spiritualité intéresse beaucoup de foromers ici. J'ai alors envie de vous demander : Pour vous, c'est quoi, c'est qui le diable ?

Portrait de nanou-69

je n'ai pas d'éducation religieuse; pourtant, à l'époque où mon ex me battait il représentait ce diable, un homme que j'avais aimé avec qui j'ai eu un fils et qui est devenu pour moi diabolique. Dieu merci les choses sont plus calmes maintenant ; je crois que le diable c'est tout ce qui nous fait mal dans la vie, ça peut être une maladie aussi; mais c'est vrai que c'est compliqué, par exemple, mon homme je l'aimais comme un dieu et après je l'ai détesté . Il était très bien et il a été très mal. maintenant, j'essaie de comprendre comment faire pour le mieux avec cette histoire...

Portrait de Gilbert. R. Psychanalyste

Bonjour Nanou,

Sachant, pour avoir lu certains de vos posts, que vous vous intéressez à la psy, je voudrais vous apporter un éclairage de cet ordre là. Dans don livre " L'amour et la haine ", la psychanalyste Melanie Klein fait état du basculement de l'amour à la haine que vous évoquez. En fait, il s'agit d'un comportement inconscient que tout un chacun traverse avec plus ou moins de bonheur dans la période infantile. Nous appelons cela le " clivage de l'objet ". Ainsi l'inconscient de l'enfant fantasme au tout début de sa venue au monde ses premiers objets d'amour (d'abord la mère puis le père) comme bon puis comme mauvais. Ce qui va entraîner une certaine culpabilité qu'il serait trop long à développer ici. Toujours est-il qu'avec le diable, il y a toujours une notion de culpabilité, de péché en quelque sorte. J'espère ne pas vous avoir trop pris la tête, Nanou, mais dites-vous que tout le monde passe par cette phase, mais différemment selon son histoire. Bonne journée à vous !

Portrait de nanou-69

Merci beaucoup Gilbert. R., Je suis touchée que vous ayez répondu à mon post; j'ai pas tout compris mais quand même l'essentiel. Je ne suis pas un cas unique donc ! Je crois que je vais demander à la bibliothèque que je fréquente s'ils ont ce livre. Ils ont un grand rayon psy et j'ai commencé à lire Dolto. Sinon, je le commanderai dans une librairie. Je commence à saisir qu'il faut que je regarde du côté de mon enfance pour mieux comprendre. Encore merci pour votre réponse et très belle journée à vous aussi !

Portrait de Jean

Je me suis posé la même question que vous, Gilbert, à propos de ce diable... Je l'ai quant même un peu " dédiabolisé ", me paraissant  moins effrayant lorsque - par langage interposé - j'ai pris ce mot au sens figuré. En effet un " diable " est aussi un outil de manutention bien utile pour transporter de lourds fardeaux. Je suis donc allé voir comment le diable pouvait être utile... Féru des travaux de Carl Gustav Jung, j'ai été attiré par son ouvrage " Réponse à Job ". Je n'ai pas tout compris mais j'ai été étonné de voir que dans ce passage de la Bible, Satan devisait convivialement avec Dieu à propos de Job. Ces deux là n'avaient pas l'air de se détester. Ils ont même fait un deal : Satan pouvait faire tout ce qu'il voulait de Job, sauf attenter à sa vie. Si Dieu a donné cette permission limitée au Diable, c'est bien que celui-ci doit être utile... Je sais, ça s'appelle se faire l'avocat du diable. Mais quitte à faire son procès, autant que ce soit équitable. Plaisanterie mise à part, ce sujet me passionne. J'espère qu'il inspirera une belle discussion...

Portrait de Isabelle

Et si le diable n'était en "réalité" que le miroir de notre dualité humaine, voulu par Dieu pour nous servir... Si Tout est Plan Divin, il est bien évident que Satan est aussi Créature divine... mais tout comme l'Humanité n'est qu'une part de la Création, il est lui aussi dans cette forme là... Et au fond, il symbolise tout autant, pour chacun de nous, des formes d'interdits, tout comme les parents posent et font preuves des limites à ne pas dépasser, pour que l'enfant grandisse et devienne à son tour adulte, finalement le diable n'est qu'un autre miroir des interdits à ne pas franchir pour la pérennisation de l'Humanité... et tout autant, ce que nous devons voir en nous pour l'améliorer et grandir encore... Au fond, serions-nous à même de nous interroger, de nous remettre en question et tendre vers la Lumière Divine, si le côté "obscur" n'existait pas ? Accepter son existence, n'est-ce pas ce que voulait dire C. G. Jung justement, en regardant et acceptant notre part d'ombre... Dans nos schémas terrestre, le jour n'existerait pas, s'il n'y avait la nuit pour lui donner sens...

Portrait de Cécile

Le diable c'est souvent le méchant, celui qui s'oppose à nous. Le problème, c'est que l'on manque parfois de discernement...

Portrait de Floriane

Le diable s'est incarné pour moi en la personne de mon inspectrice de l'éducation nationale le 4 février 2013 lors d'une inspection qui s'est très très mal passée. Cette dame venait se venger d'un truc que j'avais refusé de faire deux ans auparavant et pour lequel elle avait été embêtée par sa hiérarchie ensuite. Elle m'a laminée et mise plus bas que terre. A la fin de cette inspection qui arrivait dans une période déjà grandement chamboulée dans ma vie, je me suis sentie comme la dernière des merdes. Et c'est resté un moment. Cependant grâce a ce moment très douloureux et a ceux qui ont suivi j'ai décidé de m'inscrire au centre de formation a la psychanalyse et a la psychothérapie d'Avignon pour aller vers ce qui m'attire vraiment et où je sais que j'ai ma place, contrairement a l'éducation nationale où je ne suis que de passage (depuis 9 ans certes mais de passage quand même). J'ai d'ailleurs décidé de poster mon inscription le jour de ma réinspection. Ayant posé cet acte je lâchais déjà un peu vis a vis de cette diabolisation. Mais ça a mis du temps encore avant de cesser de me hanter. Je ne sais d'ailleurs pas si c'est complètement réglé. Mais de cet être diabolique j'ai réussi a me libérer parce que ce qu'elle "m'a fait" j'ai compris que je l'avais attiré pour m'amener a quelque chose de meilleur.  Donc dans toute chose mauvaise ou tout diable il y a de quoi trouver du bon si on se donne la peine de chercher. 

J'ai perdu beaucoup d'énergie aussi a diaboliser ma belle sœur qui elle même a fait de moi sa bête noire depuis des années. En ce qui la concerne je ne sais pas très bien ce que cela aura pu m'apporter de positif mais toujours est il que depuis quelques temps je sens que je lâche un peu du côté de cette diabolisation et surtout je perds moins d'énergie a essayer de comprendre ou de me faire pardonner quelque chose que je n'ai probablement pas fait pour qu' elle continue a ne pas être foutue d'ouvrir sa bouche pour me dire bonjour les rares fois où nous nous voyons désormais . Si elle n'est pas capable de passer au dessus de je ne sais quoi, et continue de me voir comme un être satanique et malveillant, c'est son affaire, moi j'ai d'autres chats a fouetter. Et j'essaie d'avancer. 

Je me rends compte que je viens de citer deux femmes... Le diable serait-il une femme? Peut-être, puisqu'il s'habille en Prada!

Portrait de Gilbert. R. Psychanalyste

Votre témoignage, Flora, est très parlant. Comme l'implicite Jean avec l'utilisation du sens figuré, ce que l'on croit être dans un premier temps un " mauvais diable " s'avère être un " bon diable " qui fait avancer. Comme vous devez l'apprendre dans votre centre de formation, il s'agit de ne pas s'attaquer au symptôme (saint-Homme) mais d'en faire son allié. Homme étant à prendre bien sûr dans son acception universelle (homme ou femme). Du coup, Dieu peut être une femme aussi Smile

Portrait de rephil

Le diable, le diable.... Ah ! Le diable..... Je l'aime bien, celui-la ! Ce pas comme il faut, ce prince du Ca qui titille l'esprit chagrin du fond de nos névroses et de nos conformismes. Cette autre face de la montagne, la face non éclairée et donc partie du yin et du yan  Il y eut un malade de part chez nous. Il faisait peur avec ses pustules, ses phrases décousues, sa fièvre ! Il faisait peur et nous l'avons chassé dans la forêt. Le démon était en lui ! Puis, il est revenu, guéri, tranformé ! Les démons, la mort, les bêtes sauvages n'en ont pas voulu ! Il a fréquenté le mystère, l'autre monde et il est devenu le chaman (*). La tribu s'est agrandie, les démons et les dieux se sont séparés, les démons sont partis ! Ils sont avec les autres, les étrangers, les différents, les non-hommes, les incestueux, les sauvages  puisque non de la tribu. Nous n'eumes plus qu'un Dieu, qu'un seul.... Le pauvre, il dut même divorcer (**). Le diable ? Serait-ce Ashera son ancienne épouse ? Une lilith ma fois, bien plus sympathique que la soumise Eve ?

Ceci dit, pour une spiritualité sans sombrer dans le dualisme et quelques dogmes d'où qu'ils viennent, bien que j'adore Freud, que j'aime le lire , sur le coup du religieux, je préfère Romain Rolland et son esprit océanique, comme une communion spirituelle avec un grand tout, sans dieu ni  diable comme opposés, un tout juste comme une connexion. Le diable n'en est qu'une face. C'est un peu comme le sac du père Noel, oublié là ! Tu y plonges la main sans avoir quelle merveille ou quelle horreur tu vas en sortir mais il faudra affronter l'une comme l'autre. Le diable, de toute façon, n'est jamais une excuse, une raison de se dédouaner.

Amitiés

* voir  "le chamanisme et les techniques archaîques de l'extase de Mircéa Elaide (Payot)

** voir http://lesitedelhistoire.blogspot.be/2012/06/ashera-lepouse-de-yahve.html

Portrait de Jean

Par deux ou trois fois, dans ces forums, il est fait allusion à une certaine Lilith. J'ai voulu en savoir plus et j'ai découvert un article fort intéressant sur Signes & sens dans lequel est fait le lien entre cette compagne originelle d'Adam et la femme du XXIème siècle. Je donne les références : http://www.signesetsens.com/psycho-psychologie-psychanalyse-la-cause-des...

Portrait de Gilbert. R. Psychanalyste

 " Le sentiment océanique " de son ami Romain Rolland, Sigmund Freud l'a assimilé (voire un peu réduit) à  " sa  " théorie psychanalytique du moment qui a cependant révolutionné, dans le bon sens du terme, un XXème siècle en proie au scientisme médical. Je pense que cette petite dame (la psychanalyse), qui n'a qu'un peu plus de 100 ans, est appelée à évoluer. Carl Gustav Jung a posé des jalons mais il n'est malheureusement pas encore reconnu - il est parfois même  " diabolisé " - par des Freudien purs et durs qui affirment que la seule posture orthodoxe de l'" analysé " est celle d'être " allongé ". Fort heureusement Jacques Lacan est venu lui aussi  un peu dépoussiérer ce divan en parlant d'analysant (le gérondif étant parlant à tout les sens du terme). Pour ma part, j'aime beaucoup l'apport de Mircéa Eliade et je me méfie d'une institution psychanalytique qui deviendrait une église de plus à cause du  trop fameux " Hors de l'Eglise, point de salut ! ". Décidémment le concept de projection cher à Freud, ne semble pas encore tout à fait intégré.

Merci, rephil pour votre apport !

Cordialement,

Gilbert. R.

Portrait de Gilbert

Je n'ai pas pris le temps de vous remercier pour vos commentaires. Je répare cette erreur en vous remerciant tous chaleureusement. J'ai noté les liens entre Romain Rolland et Freud. Intéressant. Je connaissais un peu le travail de cet auteur qui établit un chaînon entre l'Orient et l'Occident avec ses deux ouvrages importants " La Vie de Râmakrishna " et " La Vie de Vivekananda " qui en est le prolongement.