La vie intra-utérine selon la psychanalyse et/ou la spritualité ? Inconscient et âme ?

Portrait de Jean

Comme tous les jours depuis quelques temps, je lis un passage de " L'enseignement de Mâ Ananda Moyî ". Aujourd'hui je suis interpellé par la différence - apparente certainement - en ce qui concerne la conception de la vie intra-utérine du nouveau né. A la page 310, Mâ Ananda Moyî explique : Tant que l'enfant est dans le sein de sa mère, son pouvoir intérieur est uni à celui de sa mère et ainsi il y a connaissance de la réalité. Ce passage m'interroge car je crois que les psys disent, au contraire, que l'inconscient, à ce moment là est hors réalité. La Sage continue en disant : Par le yoga de la méditation, de la recherche du Kriya Yoga ou d'autres, l'être doit retrouver l'état de l'enfant dans le ventre de la mère... Ce qui peut être interprété comme une régression dangereuse par la psychanalyse. Pourtant, on dit que l'inconscient a accès à toute la connaissance. Ne faut-il pas différencier l'inconscient de l'âme ? Je suis conscient que cette question est pointue. Mais d'un autre côté, cette position de Mâ me perturbe un peu. C'est pour cela que j'aurais besoin de votre point de vue car je sais l'importance qu'a cet enseignement pour pas mal de foromers ici...

Portrait de Gilbert

Vous soulevez un problème qui m'interroge aussi. Il révèle à mon sens le danger d'une spiritualité déconnectée du Réel. Il y a une mode actuellement qui consiste à se prendre pour Dieu sous couvert de spiritualité. Ce qui n'est pas le cas de Mâ Ananda Moyî, me semble-t-il. L'inconscient ne serait-il lui aussi qu'un vêtement de l'âme ? Il faut, je crois, resituer cette parole dans le contexte des textes sacrés hindoux comme la Bhagavad Gita, auquel fait souvent allusion Mâ. Dans cette Ecriture, il est dit que l'âme (atma) est notre véritable identité qui voyage d'incarnation en incarnation pour prendre conscience qu'elle est reliée à Dieu de toute éternité mais qu'elle l'a oublié !

Portrait de Cécile

Si je remets cette discussion dans le contexte chrétien, il me semble que le travail de méditation ou de prière consiste à accéder à une nouvelle naissance. On parle dans la Bible, je crois, du passage du vieil Homme à  l'Homme nouveau symbolisé par le baptême. Je ne sais pas si cela peut faire avancer la discussion mais j'ose quand même apporter ma petite pierre.

Portrait de Isabelle

C'est vrai, que je ne suis pas sûre non plus de bien comprendre... Mais est-ce que l'inconscient n'est pas le "pont" nécessaire entre le corps mortel de l'individu et l'âme immortelle de cet individu...

Mais je fais un parallèle, à tort peut-être, avec ce que dit Jésus à la question de ses disciples (Matthieu 18) :

Qui donc est le plus grand dans le royaume des cieux ?

Jésus, ayant appelé un petit enfant, le plaça au milieu d’eux, et dit : Je vous le dis en vérité, si vous ne vous convertissez et si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux. C’est pourquoi, quiconque se rendra humble comme ce petit enfant sera le plus grand dans le royaume des cieux.

Portrait de Lili

Dans ce passage de Mâ dont vous parlez Jean, j’ai l’impression qu’il y a une différence entre cet état dont il est question et la vie intra-utérine pour la psychanalyse. Pour la psychanalyse, il me semble que  l’inconscient dans la vie intra-utérine vit dans le fantasme d’être protégé mais seul, donc d'être tout puissant et sa connaissance de la réalité ne passe que par la mère ( Mâ parle d’ailleurs de la circulation sanguine, une réalité mais interne, mais sans entrave extérieure) donc cet état est principalement fantasme car l’enfant n’a pas conscience qu’il est dans le ventre de sa mère. Dans la vie intra utérine, l’enfant à certes la connaissance de l’état de plaisir, du principe de plaisir mais pas encore du principe de réalité.  A mon sens, cet état d’enfant dans le ventre de la mère dont parle Mâ est donc différent car il est passé par la réalité qu’elle décrit comme la vue du monde extérieur et la respiration extérieure qui représentent une souffrance, une difficulté, une première limite : le principe de réalité en psychanalyse.

Retrouver cet état d’enfant dans le ventre de la mère est peut être cette capacité, en étant passé par l’extérieur, des limites, de retrouver un état de plaisir, une énergie vitale, en protection, mais en conscience que l’on est plus dans le ventre de la mère, que l’on est plus tout puissant donc mais que l’on peut se protéger soi-même, en essayant de reconstruire en soi la protection que nous offrait le ventre de la mère. Alors il ne s'agirait pas d'une régression au sens psychanalytique

Peut être est-il possible de voir un lien avec  la question de Jésus à ses disciples dans l’Evangile de Saint Matthieu  : le disciple doit être humble dans la foi, c'est-à-dire se considérer  par rapport à Dieu comme un enfant par rapport à ses parents, aux plus Grands, c'est-à-dire  comme l’Homme qui aurait une conscience humble de sa petite place sur Terre, par sa foi en  n’étant qu’une partie du Royaume des Cieux, (de l’Âme du monde ou l’intelligence infinie, en fonction de l’habillage de la croyance)mais une petite partie, dont il ne doit pas oublier qu’il ne détient pas les clés mais qu’elles existent quand même, à l’extérieur de lui et qu’il peut faire confiance en ce principe supérieur qui régit le monde se sentir protégé.  Mais en fait, est-ce que l’inconscient collectif (de Jung) qui s’incarne pour une petite partie dans chaque corps et qui nous permet d’avoir  l’intuition (foi) de cette Âme du monde  (Dieu)?

Portrait de Lakshmi

En Inde, l'initiation est considérée comme une nouvelle naissance, comme si la vie profane était une préparation à un nouvel état. D'ailleurs, un nouveau nom est donné au disciple. Je crois qu'il en est de même dans la tradition chrétienne avec les moines. J'ai bien aimé la réflexion de Lili par rapport à la psychanalyse. Redevenir " comme " un enfant dans le ventre de sa mère avec l'expérience de la conscience. D'ailleurs Mâ fait allusion à la mère divine. Jung y fait aussi allusion avec cet archétype. Il parle effectivement de l'anima mundi, qui se traduit je crois par l'âme du monde.

Portrait de yamina.174

J'avais zappé cette discussion fort intéressante mais, aussi surprenant que cela soit, il y a deux ou trois jours, j'ai lu ce passage dont parle Jean (ayant dans ma bibliothèque cet extraordinaire et merveilleux chef d'œuvre de sagesse de Mâ Ananda Moyî que je lis en diagonale, laissant l'Esprit Saint me guider...)...

Je me suis fait, moi aussi, la même réflexion psychanalytique, à savoir que durant la vie intra-utérine l'inconscient du fœtus est psychosé et donc coupé de la réalité. Mais, tout d'un coup, s'est imposée à moi la phrase de Jung : " L'inconscient s'incarne avec tout la Connaissance "... Ce postulat m'a libérée de cette contradiction potentielle.

Portrait de Sofia M

Moi aussi je n'avais pas vu ce thème magnifique... Merci Yamina de l'avoir fait resurgir !

Je rejoins tout à fait l'apport rappelé par Yamina, même si - comme elle l'a précisé - il est question d'un postulat. Je me permettrai de rajouter à son propos le fait que, toujours selon certains courants psychanalytiques encore, quand le bébé vient au monde, il garde cette fameuse Connaissance mais c'est avec l'apparition du langage qu'il commence à la refouler... Ce raisonnement peut d'ailleurs nous entraîner très loin : pourquoi, par exemple, quand nous visitons un lieu méconnu pouvons-nous avoir le sentiment de le " connaître " ? Ce sont des choses qui me sont arrivées et je pense que je ne suis pas la seule...

Portrait de Isabelle

D'accord avec "cette sorte de certitude" de "connaître un lieu" alors que l'on sait pertinemment que c'est la première fois qu'on le voit... Ce sentiment, je l'ai eu lorsque j'ai découvert la Corse... Et je dirais même pour y être allé à trois reprises, que c'était à chaque fois "plus fort". Cette île est indéniablement d'une grande beauté, mais c'est "autre chose" que juste les paysages magnifiques. Une sorte de sensation "'d'unisson" avec les lieux... Avec dans un premier temps, en posant les pieds sur le sol Corse, une sensation de tout le corps comme devenant particulièrement "lourd" durant les premières heures, puis ensuite, une sorte "d'état jubilatoire, de grande joie" comme lorsque on est parti de chez soi durant une période, et qu'on est ensuite très heureux de s'y retrouver à nouveau... Et plus particulièrement je pense à deux endroits... Un, se trouvant en remontant au-dessus d'Ajaccio, dont j'ai "oublié" le nom... Un ancien pénitencier en ruine, au sein d'une forêt d'eucalyptus (quelqu'un m'a dit d'ailleurs, que cette forêt d'arbres magnifiques a été en grande partie détruite par un incendit...), ces eucalyptus ayant été planté par les prisonniers, pour éloigner les moustiques qui pullulaient, puisque ce pénitencier avait été construit dans une zone marécageuse. Je m'y suis rendue par deux fois, et dans des temps distincts... Et inexplicablement ce lieu ne m'est pas inconnu... Sur un autre point de l'île, inexplicablement, en me trouvant à Calvi, là encore une "certitude" d'y avoir vécu, et d'y être véritablement chez moi, et un sentiment profond de paix... Je "sais" que ça n'est pas juste du fantasme, car j'ai pu faire bien des parallèles avec mon histoire actuelle, pour diverses raisons d'ailleurs... Et "d'ailleurs", très sensible à la musique et au chant depuis que je suis enfant, une autre "certitude, bien que là encore en définitive subjective", en écoutant les chants corses, et en particulier les chants sacrés, il y a un aspect émotionnel particulier, que je ne vis intérieurement, qu'avec ces chants... Ce qui me fait faire un autre parallèle... Celui à Jung justement... J'ai lu, mais il y a longtemps maintenant, un ouvrage s'intitulant "L'âme et le Soi"... Le Soi ayant valeur d'inconscient par rapport au Moi qui est le conscient... Et si je ne me trompe pas, il y est question d'individuation en lien avec l'unicité de l'être, qui permet à l'individu de "rétablir" la communication avec son âme et d'être en adéquation avec sa propre subjectivité qui a valeur de "vérité individuelle", "vérifiable" par le symbolique... J'espère que je ne dis pas trop de bêtise en le disant comme celà... En tout cas, le simple fait de "faire référence" à cet ouvrage, un signe qu'il serait bienvenu pour moi, d'en faire un nouvelle lecture...

Portrait de Gilbert

J'ai connu aussi cette impression de me retrouver chez moi dans des lieux particuliers où je n'avais jamais mis les pieds avant. En ce qui me concerne, cela va aussi avec une sorte de certitude de se trouver à sa place au bon moment. C'est effectivement inexplicable d'un point de vue rationnel. Le lieu auquel je pense est un local où il m'arrive de faire du bénévolat. Je l'ai tout de suite reconnu comme étant en adéquation avec ce qu'avais à y faire. Je n'ai jamais eu cette sensation dans toute ma carrière d'enseignant. C'est effectivement assez mystérieux !

Portrait de Viviane

Tout à fait par " hasard " j'ai découvert cette légende pas plus tard qu'hier... Cette légende, remonterait d'ailleurs à l'origine aux traditions religieuses égyptiennes, mais on en trouve ensuite traces modifiées dans les traditions gréco-romaines et aussi dans des textes sacrés de confession juive. La légende telle que je l'ai découverte serait plus récente et serait transmise de façon orale sous forme d'un conte... Cette légende dit que lorsque l'enfant est dans le ventre maternel, il possède toute la connaissance de l'Histoire de l'Humanité depuis ses origines... Lorsque l'enfant vient au monde il "sait". Puis lorsque l'enfant donne les premiers signes du langage, l'Ange de l'oubli se penche vers l'enfant, et pose son index sur la bouche de l'enfant en disant "chut". Et le petit enfant "oubli" alors tout ce qu'il savait. L'empreinte du doigt de l'ange posé, correspond à la marque verticale au-dessus de la lèvre supérieure. La légende dit aussi, que pour les enfants les plus "bavards", l'ange a posé son doigt plus fort, et a donc laissé trace en forme de faussette sur le menton... C'était juste pour faire un lien, parce que dans le calcul des probabilités, avec l'orientation de cette discussion... Il me semblait important de le partager ici...

Portrait de Jean

Cette légende est passionante en effet. Je suis interpellé par le fait que ce soit un ange (donc une créature protectrice) qui soit vecteur d'oubli. Ce qui voudrait dire qu'il n'est pas bon de tout savoir. Ceux qui croient en la réincarnation expliquent qu'il est normal que l'on ne se souviennent pas de nos vie antérieures. Seul Dieu a cette connaissance. Il est en effet possible que nous ne supportions pas la vérité. Un peu comme un enfant ou même un adulte à qui on ne peut pas tout dire de peur de l'abîmer. Il est donc là question de maturité spirituelle comme on peut parler de maturité psychique. Votre post, Viviane, apporte un éclairage intéressant !

Portrait de Gilbert

Sur le calendrier du jour qu'une amie chrétienne m'a offert, il est inscrit un curieux verset qui semble correspondre à ce qui est dit ici. Il s'agit de Genèse 41. 51 : Dieu m'a fait oublier toutes mes peines et toute ma famille... L'ange de l'oubli peut être donc salvateur dans la mesure où il nous fait oublier les peines passées comme pour nous donner une seconde chance...

Portrait de Jean

Le langage qui favorise le refoulement. Je trouve cela très intéressant et je n'y avais pas pensé. Ce qui me ramène au prologue de l'Evangile de Jean avec " Au commencement était le Verbe " et aussi à Jacques Lacan qui distingue le discours du langage. Ce discours lié au désir serait-il donc en lien avec le Verbe du commencement ? Je veux dire par là que l'inné étant en lien avec ce désir, peut-être y-a-t-il quelque chose à saisir dans la transmission lacanienne, d'autant qu'il parle de  " l'Un ". Je sens intuitivement qu'il existe là une articulation à trouver pour mieux comprendre la phrase de Mâ Ananda Moyî, une articulation qui doit se trouver aussi dans les travaux de Carl Gustav Jung. Merci pour vos réponses qui commencent à déblayer un peu le terrain d'une confusion possible. En tous cas, je me laisse porter par vos coms...

Portrait de Cécile

Eckart Tolle, auquel il a été fait allusion ici,  parle d'un espace au-delà des mots. Ecouter le silence, dit-il, permettrait l'arrêt du flot des pensées sans perte de conscience. Cette dimension de perception du silence correspond, selon lui à vivre l'instant présent. Il parle d'un Etat de présence inconditionnée. Difficile à réaliser me semble-t-il. 

Portrait de nanou-69

J'ai lu un article sur Joseph Murphy dans Signes & sens. L'auteur, Xavier Santi, explique qu'il existe au niveau subconscient un réservoir d’énergie et de connaissance insoupçonnable. Appelé Dieu ou Puissance de vie, selon sa croyance, cette énergie se trouve à l’origine de la formation de notre corps, de nos organes. Je ne suis pas encore trop instruite au niveau psy. Lacan, j'ai essayé, j'avoue que je n'y comprends rien. Par contre ce psychologue(facile à lire)  parle peut-être de l'âme qui serait cette énergie logée dans le subconscient