Doit-on TOUT dire à ses enfants pour qu'ils aillent bien ?

Mon titre se veut volontairement un peu provocateur, chère Horia.

Cette grande dame de la psychanalyse qu'était Françoise Dolto, dans son souci de transmettre la psychanalyse à des non-initiés, n'a pas échappé, soit à une déformation de ses propos sortis d'un contexte, soit à des erreurs qui font partie de la nature humaine. Nous, psychanalyste, avons l'habitude parfois de parler de " Doltoïte aiguë " un peu nocive surtout lorsque cela débouche sur une culpabilité des mères.

Rassurez-vous, Horia, il n'est surtout pas question de  " tout dire ". D'ailleurs, qu'est-ce que signifie " tout dire " sachant que cette soit-disant vérité passe par le filtre des perceptions de chacun et qu'elle n'est jamais tout à fait objective mais chargée d'affects en tous genre ?

Un enfant, s'il a besoin de savoir quelque chose va le demander. Il n'est pas question de lui assener tout et n'importe quoi. Et puis, souvent il ne va même pas écouter la réponse... Arrêtez donc de vous culpabiliser et faites de votre mieux au quotidien. Vous n'êtes absolument pas dans l'obligation de faire un compte rendu familial à votre fils. Il possède tout en lui pour se construire. Faites lui confiance et répondez simplement à ses questions éventuelles en restant ce que vous êtes. Le seul fait qu'il sente une mère à son écoute lui fera du bien car c'est surtout cela être une bonne mère. Je ne sais pas si mes collègues seront d'accord avec moi, mais ne prenez pas les livres de Dolto comme paroles d'Evangile... Elle ne s'appelait ni Marie ni Jésus.

PS : d'ailleurs, la qualité de Marie était le oui et le silence...

Très bonne soirée à vous !

Gilbert. R.

Je respecte moi aussi beaucoup Françoise Dolto mais force est de constater que nous ne sommes plus dans le même contexte. Elle s'était insurgée contre le fait que l'on ne se préoccupait pas assez des enfants en tant que personne. Sauf qu'il y a eu une dérive sociétale vers une sorte d' " enfant roi ". On n'aosait même plus punir son enfant de peur de le traumatiser. Sauf qu'un enfant a besoin de limites et cela est rassurant pour lui. Je crois que Françoise Dolto parlait de cela aussi mais on a récupéré que certaines bribes. Et puis c'était aussi la mouvance " mai 68 " ou l'expression à tout va, l'interdiction d'interdire et la faute à l'autorité quelle qu'elle soit. Je crois que l'on paye les pots cassés aujourd'hui. Il n'y a qu'à voir la côte qu'a l'extrèmisme politique qui veut revenir en arrière. Mais ce n'est que mon avis... Pour en revenir à votre question : non, je ne pense pas qu'il faille tout dire à nos enfants. Il y a des choses qu'ils n'ont pas besoin de savoir, surtout s'ils ne demandent rien.

Bonjour Horia, une mère "suffisamment bonne" - concept de D.W.Winnicott - cherche à agir au mieux pour son enfant, et c'est ce que vous faites. Ce qui ne signifie pas que ce mieux existe, on cherche à l'approcher, c'est déja ça. Je rejoins ce qui a été dit avant moi dans ce sens que si un enfant est toujours prêt à entendre la réponse à la question qu'il pose - dans la mesure où cette réponse lui est donnée simplement et adaptée à son âge - pour autant on ne peut pas tout dire à ses enfants, la circonspection, ici comme ailleurs, a sa raison d'être. Mais juste une question, Horia. Votre post ne traduit-il pas le fait que le temps est venu pour vous d'accepter cette partie de votre famille pour ce qu'elle est? Accepter ne signifie pas cautionner. Ce positionnement différent vous permettra de mettre en place un détachement à la fois protecteur et libérateur pour vous-même et pour votre entourage. De plus, votre ado "rebelle" - ce qui reste bien sûr inhérent à cette période de la vie, donc somme toute "normal" - pourra objectiver grâce à vous une véritable possibilité évolutive. 

Je ne connaissais pas ce concept de D. W. Winnicot. Apparemment, il n'y a donc pas que Dolto.

N'étant pas psy mais très intéressé par cette discipline, j'ai eu l'occasion de lire " Dialogue avec les mères " du psychanalyste Bruno Bettelheim. Je n'ai pas l'impression qu'il ait conseillé de tout dire aux enfants. Un peu comme Sandrine Pascual, il répond par une autre question jusqu'au moment où la mère trouve sa propre réponse. Un procédé socratique qui est loin de faire peser la responsabilité des aléas de l'existence de l'enfant sur les épaules de la mère...

Modestement et d'après ce qu'il me reste de mes cours d'Analyse transactionnelle, la psychologie est un peu revenue du TOUT dire à ses enfants... Il serait plutôt préconisé aujourd'hui d'attendre qu'un enfant pose une question sur un ou des membres de la famille... C'est de cette façon que nous procédons ma femme et moi avec notre fils. Sauf qu'il ne nous a jamais posé la moindre question !

C'est logique ce que confie Orlan quant à son fils car un enfant " sait " qui est qui dans une famille, quels sont ses qualités et ses travers... Déjà parce que ne nous leurrons pas, il observe très tôt et écoute...

À mon sens et malgré le très grand respect que j'ai pour Françoise Dolto, je pense qu'il est néfaste quoi qu'il en soit de projeter un enfant dans un univers qui soit ne le concerne pas psychologiquement, soit dont il souffre déjà inconsciemment, ce qui équivaudrait à passer un fer rouge sur une brûlure... Personnellement, je suis issue d'une fratrie importante : même éducation donnée à chacun des enfants, des profils extrêmement différents, certains ayant un équilibre parfait, d'autres connaissant dérives et régression... Pourtant, nous avons reçu amour et attention de la part de nos parents...

Mon fils, à propos de son parrain qui a eu une trajectoire de vie problématique, ne m'a pas posé de question. J'ai alors évité d'aborder le sujet et je continue. Je me suis dit que c'est parce que ça ne lui posait pas vraiment de problème et que c'était surtout à moi de faire avec cette histoire...

Je n'ai jamais ressenti le chanteur Carlos (qui aurait d'ailleurs pu choisir un autre nom de scène compte tenu du fait qu'à la même époque un autre Carlos était un terroriste !!!), que j'aimais bien au demeurant, ait été particulièrement bien construit... 

S'il suffisait de " tout " dire à son enfant sur sa famille pour qu'il aille bien, ça se saurait ! Sans compter que certains enfants élèvés dans des conditions difficiles s'en sortent très bien dans la vie et sont très équilibrés. Heureusement d'ailleurs !

Je suis jeune et c'est vrai que sa mort m'a particulièrement interrogé au point que je suis allé un peu me renseigner sur la biographie de cet artiste. J'ai découvert qu'il n'était pas si épanoui dans sa vie privé que j'aurais pu le croire, en tant que fils de psy.

Raconter à son enfant que le grand-père était un collabo et que la vieille tante est morte d'une cirrhose du foie, par exemple, c'est juger... Je ne suis ni psy ni maman mais, instinctivement, je pense que les jolies histoires familiales vraies sont plus appropriées...

... Avec tes enfants t'as toujours tort !

C'est ce qu'expliquait Freud qui s'est bien gardé du moindre conseil aux parents... Il a eu la courtoisie d'expliquer pourquoi et comment un inconscient évoluait ou involuait mais sans jamais juger les géniteurs ou les éducateurs. Mais c'était avant... Mai-68 !!!

Je n'ai pas encore d'enfant mais cette discussion est très intéressante pour un éventuel futur papa. En fait, il faut trouver la voie du milieu et se faire confiance. Dire comme on peut en fonction de la demande d'un enfant. Ne pas dramatiser ni idéaliser. Finalement, y a du boulot mais faut pas non plus en faire une maladie et " toute une histoire "...

Je ne suis pas maman mais je suis aide puéricultrice et je peux vous dire que cette discussion m'apprend plein de choses, y comprit pour mon boulot!

Merci.

Moi aussi, j'ai beaucoup appris. Mais, surtout, même si je ne suis pas psy, j'ai réalisé que je n'ai pas été une si mauvaise mère que ça en terme de dire ou ne pas dire. j'ai simplement essayé et j'essaie encore de répondre aux questions de mes enfants le plus objectivement possible, sachant que cela passera toujours par mon filtre des perceptions et autres jugements projectifs. Merci également.