Inégalité entre les destinées?

Portrait de Flo

J'ai 36 ans et + je vieillis et + je me demande s'il y a réellement des inégalités entre les destinées. Je finis par me demander si je n'ai pas l'illusion que l'herbe est + verte dans le pré du voisin.

Je m'interroge et je n'ai pas de réponse qui me convienne. 

Je me suis inscrite au début du mois sur ces forums étant attirée notamment par la dimension spirituelle de beaucoup de foromers qui viennent discuter ici. C'est pour cette raison que je lance cette discussion et je serai très heureuse que vous y participiez. Ce thème me semble important et je vous remercie de livrer votre position.

Flo

Portrait de Jean

L'être humain étant unique, je pense qu'on ne peut pas à proprement parler d'inégalité de destinée. Chacun a la sienne en fonction de choses que l'on peut essayer de comprendre et d'autres qui nous échappent complètement. Il y a longtemps que je n'envie pas une autre destinée, aussi prestigieuse soit-elle. Tout simplement car je n'en vois que le positif, l'apparence. On peut envier la destinée artistique de Johnny Hallyday ou d'un(e) autre célébrité, mais cette incarnation est-elle véritablement plus enviable qu'un moine inconnu dans son monastère ? Qui a la meilleure part ? Une question à mon sens inutile car elle nous éloigne  de nos propres interrogations sur nous-mêmes. Sûr que les réponses se font parfois attendre et surtout les réponses qui nous conviennent. Mais savons-nous réellement ce qui nous convient ? Pour ma part, je crois que Dieu sait très bien ce qui me convient et certainement mieux que ma pauvre compréhension humaine. A mon âge (plus de 60 ans) je commence à essayer de mettre ma confiance en Lui et d'arrêter de me prendre la tête de trop.

Merci pour cette question qui m'a fait (un peu) réfléchir, Flo.

Jean

Portrait de Ludo_437

J'aime beaucoup le commentaire de Jean et bien que j'aie la moitié de son âge (lol), j'adhère tout à fait à son raisonnement plein de bon sens... En ce qui me concerne et bien que ce ne soit pas ma génération, j'aimerais bien avoir la voix de Johnny Hallyday mais pas sa fragilité psychologique... De toute façon, un être humain est double. Sa destinée présente toujours et sans exception du positif mais aussi du négatif. On ne pourrait pas s'élever humainement, voire spirituellement, s'il en était autrement.

Portrait de Christine-zen

L'être humain est très digne et, en règle générale, on ne connaît pas ses souffrances. Une de mes relations, alors que nous parlions d'une famille endeuillée récemment et que nous connaissons, m'a dit qu'ils étaient décidément très marqués par le destin puisqu'ils ont enterré 2 jeunes. Je lui ai répondu que déjà 30 ans s'étaient écoulés entre ces 2 décès et que les drames de la vie ne se résumaient pas qu'à la mort. Elle n'a rien voulu entendre malgré l'énumération que je lui ai faite des tragédies existentielles... J'ai donc laissé tomber ! Tout un chacun a son lot mais c'est à chacun d'entre nous d'accueillir les évènements douloureux comme des leçons qui nous sont envoyées pour que nous progressions et que nous nous élevions spirituellement, histoire de devenir " meilleurs "...

Portrait de Amélie

J'ai commencé ma vie de très jeune femme en étant mère célibataire. J'ai 60 ans maintenant, et je pense que c'était une grande leçon de ma vie. Comment se fait-il que j'ai commencé de cette façon ? Là je n'ai pas la réponse, mais cette épreuve était nécessaire pour ouvrir mon coeur... Alors que j'aurais pû au contraire le fermer à double tours...

Portrait de Viviane

Je suis d'accord avec le fait que si certaines destinées semblent plus marquées, plus lourdes que d'autres, en fait ce n'est qu'une apparence... Facile de le dire de cette façon ? Peut-être... Je ne suis pas un exemple de zénitude dans ma façon première de fonctionner, et bien souvent je me rebelle avant que de me tourner autant que possible du côté de l'acceptation. Il est vrai qu'un solide travail analytique m'a bien encouragée à regarder de préférence de ce côté-là... Et que j'ai commencé peu à peu à intégrer (à ma mesure et rien n'est jamais acquis...) au moment ou j'ai commencé à entendre pour moi-même que nous n'avons que les épreuves que nous pouvons supporter... Ce qui, au-delà des apparences peut aussi vouloir dire que fondamentalement il n'y pas d'inégalités mais que nous avons tous à faire avec notre histoire.

Portrait de Danièle-Dax

Personnellement et en tant que sexagénaire, je n'en connais pas. Je vais reprendre le point de vue de Christine-zen : en fait, sous les sourires se cachent la plupart du temps des angoisses, des drames... Mais nous n'en parlons pas. Sur l'ensemble d'une vie, à durée égale, j'ai pu constater que nous sommes globalement tous logés à la même enseigne. Mais, ce dont je me suis rendu compte, c'est que nous imaginons toujours que les souffrances du voisin sont moins pires que les nôtres. Ça, c'est une erreur. En fait, le voisin supporte des choses que je ne pourrais pas supporter et je supporte des choses qu'il ne pourrait pas supporter. C'est le regard erroné sur le chemin existentiel des autres qu'il faut avant tout corriger.

Portrait de Psycot

En tant que psychothérapeute je peux vous assurer qu'il n'existe pas de destinée mieux qu'une autre. Ce qui se retrouve et qui peut donner l'illusion que c'est mieux chez les autres c'est ce que dit Daniele-dax. Effectivement, dans le transgénérationnel le symptôme se répète et tant qu'il n'est pas "accepté" en tant que leçon, il vient se cristalliser à nouveau sur certains membres de la famille. C'est souvent le cas des cancers. Ces familles-là ne sont pas plus marquées que d'autres. Chez ces autres ça pourra être des décès d'enfants, des anomalies congénitales comme la surdité mais qui, malgré les progrès de la science et de l'échographie en particulier, ne peut pas être détectée... Etc. Etc. Alors c'est vrai qu'on pourrait avoir tendance à penser qu'il est moins grave de naître complètement sourd sur plusieurs générations que de perdre des enfants jeunes sur plusieurs générations. Sauf que l'enfant qui s'incarne avec une surdité bilatérale totale, sera muet... Et c'est terrible également..'

Portrait de yamina.174

Quand j'étais enfant, je voyais passer - rarement d'ailleurs - un couple qui avait une fille unique trisomique. Ces parents la sortaient très peu et en grandissant j'ai fini par comprendre qu'ils en avait honte car le regard des autres sur cette anomalie chromosomique est terrible. Peut-être ce couple pensait-il que sa destinée était bien plus difficile que celle de mes parents et que la mienne qui étions regardés pourtant comme de " sales arabes ", insulte suprême à laquelle j'ai eu droit de nombreuses fois à l'école... Tant que cette souffrance est ressentie comme injuste, il est impossible de la dépasser. J'ai réglé ma honte le jour où j'ai fait quelque chose de positif' de ce racisme incompréhensible car n'oublions pas que nous ne choisissons pas de naître Juifs ou estropiés, pas + que nous choisissons d'être en échec scolaire ou délinquant ou... Liste très longue à établir et mon temps de pause terminé...

Portrait de Domino

Mon mari et moi avons eu la chance de ne pas nous sentir honteux de la naissance de notre enfant "différente". En revanche, nous nous sommes sentis très longtemps coupables mais nous avons fait un long chemin spirituel avec un prêtre et nous sommes alors rentrés en Joie. Y compris nos 3 autres enfants. Il faut croire que le bonheur est communicatif car notre adorable trisomique rit beaucoup elle aussi. Par moments elle réalise ses limites, elle n'en fait pas une "maladie", et c'est curieux mais elle les accepte. Elle ne s'énerve pas. Son état déficient c'est sa vie et quelque part elle ne cherche pas à le nier ou à s'en débarrasser. Son enseignement quotidien est là pour toute notre famille. Il y a quelques jours j'ai surpris notre plus jeune fils, qui est toujours étudiant, en grande conversation avec cette sœur "différente". Je les ai observés et écoutés discrètement pour ne pas les déranger et, je l'avoue, un peu poussée aussi par ma curiosité. Il lui disait en substance: "Je galère depuis la rentrée mais toi je sais que tu ne te prendrais pas la tête à ma place!". Elle l'écoutait sans fatalement comprendre, elle s'est levée (elle adore être assise sur le tapis du salon) et elle est allée lui chercher une écharpe à elle qu'elle avait eue en cadeau au Noël dernier. Elle lui a donné et il l'a mise autour de son cou en lui disant:" Tu veux me dire que l'essentiel c'est que je prenne soin de moi, de ma santé, que je ne me crève pas trop dans mes études et que sûrement à Noël j'irai mieux! Ok. Super. Je prends note!". Elle a éclaté de son gros rire et elle lui a fait une bise rapide. j'étais sidérée par cette scène. Sidérée par l'interprétation de mon fils, de leur compréhension mutuelle... Il n'y a pas de honte à avoir un enfant trisomique ou une différence quelle qu'elle soit. Tout a une signification. Tout a un sens.

Portrait de Gabrielle

Je suis très touchée par le témoignage de Domino. C'est vrai que les enfants handicapés nous donnent de sacrées leçons de vie. Peut-être est-ce là le sens ? Je regardais un reportage au sujet d'une jeune ado de 14 ans aveugle suite à une maladie dégénérative des yeux. Elle a l'objectif de participer à un importante compétition d'atlhétisme dans le cadre d'handi-sport. Son père n'a toujours pas accepté le handicap de sa fille et montrait beaucoup d'émotion pour en parler. Il disait que la vie était injuste et que ça aurait du tomber sur lui. En fait, il ne m'a pas convaincu. Je pense que sa fille a psychologiquement les épaules beaucoup plus solide que lui et que cet homme n'aurait pas supporté un tel handicap. Ce qui va tout à fait dans l'esprit de vos commentaires.

Portrait de luna_95

Le post de Domino est l'exemple même d'un courage et d'une acceptation inouïs.

Ayant perdu mon fils unique d'une mort subite du nourrisson, j'essaie chaque jour de travailler dans ce sens afin de ne surtout pas crier à l'injustice (je suis croyante). Des lectures spirituelles m'aident, independamment de ma foi mais quand je vois des mamans avec leur bébé, je ne peux m'empêcher de les envier. J'essaie de combattre cette forme de jalousie, indépendante de ma volonté et qui, en plus, est loin d'être chrétienne et je souhaite de tout cœur dépasser ce mauvais sentiment... J'essaie également de me convaincre que mon petit Enzo est mieux où il se trouve que sur cette Terre si difficile mais il me manque tant que ce raisonnement ne tient pas longtemps... Je sais aussi que si Dieu a voulu pour moi ce destin, c'est qu'il me le fallait, même si je le trouve sévère, car j'ai confiance en Lui mais il n'en demeure pas moins que l'absence de mon petit garçon me ronge jour après jour...

Portrait de Flo

Si j'ai bien compris vos commentaires, la perception de l'inégalité entre les destinées viendrait de la mauvaise approche que l'on a de la sienne en n'en retirant pas l'enseignement qui va avec... Très intéressant. Je vais réfléchir à cette hypothèse. Merci.