Je souffre de ne pas être comme tout le monde

Portrait de Elise

En ce moment je déprime un peu, même beaucoup.

Ce matin, réveillée aux aurores, je faisais mon examen de conscience dans mon lit. J'ai réalisé que depuis l'enfance je souffre de ne pas être comme tout le monde.

Je suis issue d'un milieu modeste mais ça ce n'est pas le + grave. Ma mère est toujours passée pour zinzin, ce qui est vrai, et elle a tendance à lever le coude. Ce que tout le monde sait et a toujours su dans notre entourage. Donc honte pour moi depuis que je suis toute petite. Les conséquences ont été multiples. Notamment elle n'a jamais voulu m'inscrire au catéchisme. Disons qu'elle n'a jamais pris la peine de le faire. Ça devait être trop fatiguant ! J'allais en cachette à l'église et je parlais à Dieu. J'aurais aimé faire ma communion solennelle comme mes copines mais aussi parce que la spiritualité, même si je ne pouvais pas mettre de mots sur mon désir, m'attirait. Certainement dégoûtée par l'attitude passive et laxiste de ma mère, et de mon père qui voulait avoir la paix car ma mère quand elle est en colère est une grande hystérique, je suis carrément tombée dans l'athéisme. Ensuite j'ai découvert mon homosexualité. Je n'ai que 36 ans mais il y a 25 ans, c'était la faute ultime... Bien sûr que là encore j'ai planqué cette nouvelle différence. Je me suis alors réfugiée dans les études et là j'étais plutôt satisfaite. Sauf que je ne m'en suis jamais servie et que je me suis lancée dans l'achat d'un magasin de sport où j'ai survécu grâce à la générosité de ma compagne. Heureusement, je suis parvenue à vendre mon affaire. Pour l'instant, j'hésite à reprendre mes études mais là encore je me demande pourquoi. Sauf qu'il va falloir que je me bouge dans la mesure où le peu d'argent que j'ai retiré de mon commerce fond comme neige au soleil. Je m'intéresse au bouddhisme mais qui ne m'apporte pas les réponses aux questions existentielles que je me pose. Je sais qu'il faut que je bosse davantage ce secteur. Bref, je pourrais en rajouter des tonnes mais je ne voudrais pas vous lasser et j'ai besoin de vos lumières. En fait, depuis tout le temps, j'ai l'impression de ne pas être comme tout le monde et j'en souffre. Cette souffrance m'est de + en + insupportable. Comment m'en défaire ?

Portrait de yamina.174

En ce sens vous n'êtes pas différente !

Portrait de Christine-zen

À méditer ! Ce que je vais faire sérieusement dès aujourd'hui car je ressens de mon côté, pour des raisons " différentes " de celles d'Élise, comme douloureuses certaines de mes caractéristiques psychologiques et existentielles...

Portrait de Gilbert

Un koan effectivement. Qui me renvoie aussi à mon unicité pas toujours confortable. Je suis né dans une famille où les hommes (père et grand-père) ont eu des problèmes psys. Heureusement que le Bouddhisme et plus particulièrement le Bouddhisme Zen s'est imposé à moi à l'âge de 30 ans. Des lectures et des rencontres m'ont fait petit à petit comprendre (et je n'ai pas fini ma quête) qu'il ne faut pas rester fixé à la forme et surtout au regard extérieur qui juge et projette. Le Bouddhisme véhicule qu'il y au plus profond de soi quelque chose d'unique, inaliénable. Heureusement que vous n'êtes pas comme tout le monde, Elise. Je pense que cette différence est une chance pour aller voir ce bijou qui habite en vous, à nul autre pareil bien sûr.

Portrait de yamina.174

. Suite de mon post de ce matin car j'ai eu de la visite !

Étant d'origine familiale maghrébine, les débuts de ma scolarité en France n'ont pas été simples... Avec en + une maman qui ne s'habillait pas à l'européenne... J'étais une enfant triste, introvertie et timorée. J'avais l'impression qu'on se moquait de ma mère quand elle venait me chercher à l'école. Un peu comme vous, cette " différence " et la mauvaise manière que j'avais de la gérer ont tout de même été un moteur pour mes études. Je cherchais névrotiquement à réhausser inconsciemment le niveau social modeste de ma famille en étant une très bonne élève mais les complexes s'agitaient malgré tout. Un jour, j'ai fait la connaissance d'une de mes cousines qui vivait jusque-là au Maroc. Elle était sourde et muette et avait mon âge. Elle avait une qualité entre autres que je n'avais pas : elle souriait tout le temps. La communication entre nous n'était pas aisée mais je l'aimais beaucoup et c'est ainsi que j'ai appris à m'adapter à son handicap et à... sourire... Rapidement, j'ai d'ailleurs attiré davantage de copines mais l'essentiel n'était pas là. J'ai compris que cette cousine n'avait pas d'autre choix que d'accepter sa différence, d'être aimable compte tenu de ses difficultés à communiquer et d'ignorer le regard des autres. La leçon la + importante qu'elle m'ait donnée, c'est qu'elle m'a appris que toute différence est au service de l'entourage. Effectivement, elle avait une élocution incompréhensible mais, à sa façon, elle m'enseignait. C'est ainsi que je me suis débarrassée de ce que pensaient les gens alentour. Je me suis longtemps  répété que moi également j'avais quelque chose à apporter, à transmettre et que je n'avais pas à être triste ni étriquée par celles et ceux qui me tournaient le dos. J'ai maintenant intégré cette évidence.

Portrait de Solange

Votre témoignage, Yamina, me touche beaucoup car il est concret. En venant ici, j'ai découvert un homme handicapé qui a vraiment fait quelque chose de sa différence. Il s'appelle Alexandre Jollien et a de la difficulté à se mouvoir depuis son enfance. Sa voix n'est pas assurée mais j'ai écouté un CD qui s'appelle " Vivre sans pourquoi " et c'est très fort. Je vais continuer à m'intéresser à ces différences qui font vraiment La différence. Merci pour cette occasion de réfléchir plus en profondeur en lâchant un peu les apparences qui nous fourvoient souvent.

Solange

Portrait de Amélie

Ayant été une mère célibataire très tôt, et à une époque ou c'était bien moins "banalisé" qu'aujourd'hui... Je peux dire que j'ai souffert quelquefois du regard d'autrui. Pourtant je pense que ça été une grande force dans ma vie. Puisqu'au bout du compte, ça m'a appris qu'au fond, malgré cette image renvoyée, j'étais bien autant fiable et capacitaire que tout autre individu. Regardez du côté de vos différences qui ont amené du positif, de la solidité dans votre vie. Vous parlez de votre mère et de sa fragilité... Dans vos différences déjà, il y a le fait indéniable que vous n'avez pas cette fragilité... Ca peut paraître une lapalissade dit comme ça... Mais pourtant vous n'avez pas "reproduit" pour vous même cette fragilité maternelle...

Portrait de Sofia M

J'ai eu un peu la même trajectoire de démarrage dans la vie que Yamina et pour des raisons identiques aux siennes. À force de souffrir, je me suis attardée sur mes origines raciales en voyant à la longue qu'elles ne constituaient quand même pas une tare et j'ai appris à les aimer. J'ai compris par voie de conséquence que mes différences viennent compléter les différences des autres. Ne combattez + les vôtres. Faites-en des amies et donc une force. Je vais prendre un autre cas me concernant. La vie a fait que je n'aurai pas d'enfant. Au regard des évènements mondiaux qui ne laissent rien augurer de bon (il n'y a pas que Monsieur Trump et le FN dans le paysage géo-politique qui ont de quoi faire trembler...) et alors que j'ai souffert par périodes de ne pas être maman, je suis heureuse aujourd'hui de ne pas être parent. 

Portrait de zen03

Voyez le bon côté de vos différences comme le suggère Sofia M. Votre vie vous conviendra dès lors...

Portrait de Lakshmi

Je viens de découvrir le post de Sofia M. Il se trouve que je ne peux pas avoir d'enfant, suite à une grossesse intra-utérine et une opération chirurgicale. J'en ai longtemps souffert. Ce qu'a écrit Sofia me fait définitivement accepter cette situation, consciente que je suis aussi du contexte mondial.

Portrait de Orlan

Il me semble que l'utilisation abusive du terme " différence " constitue une erreur en soi. J'induis ici que lorsqu'on observe les êtres humains d'un peu près, on se rend vite compte que nous avons tous les mêmes caractéristiques, les mêmes réflexes - bons et mauvais -. Si différence il y a, elle se situe dans les passages à l'acte mais, encore une fois, nos penchants sont identiques. Ainsi, qui n'a jamais eu envie de voir disparaître son ennemi ? Par contre, chez le sujet normalement névrosé, pas question bien entendu de le tuer ! Un hétérosexuel, selon le contexte, peut être très tendre, donc très féminin. Une hétérosexuelle peut être très " dure " dans la direction d'une entreprise. Tout simplement parce que nous sommes doubles, toutes et tous issus d'un principe masculin (le père) et d'un principe féminin (la mère). Qui n'est pas gourmand ? Qui n'aime pas l'argent ? Qui n'a pas envie d'être belle ou beau ? Et la liste pourrait être longue de l'absence fondamentale de différences. Personnellement, Élise, je suis certain que si à partir de maintenant, vous vous répétez que vous êtes comme tout le monde, tout ira pour le mieux. Reconnaissez-vous dans le fonctionnement de l'humanité et vous serez en paix car j'ai l'impression que c'est vous qui vous en excluez.

Portrait de Christine-zen

J'aime beaucoup la sagesse qu'a développée Orlan dans son post. Elle me ramène au grand principe bouddhiste qui explique que tout changement positif n'est possible que si nous acceptons notre quotidien tel qu'il se présente, notre entourage tel qu'il est, sans aucun jugement, mais pour parvenir à cette tolérance libératrice, il est obligatoire de nous accepter tels que nous sommes. 

Portrait de Régis

Je suis d'accord avec la réflexion d'Orlan. Nous fonctionnons tous de la même façon mais nos histoires étant différentes il existe une unicité de l'être. Nous n'avons pas la même éducation, les mêmes goûts, les mêmes carractères, ce qui constitue une richesse dans le partage.  " Alter ego " en latin, signifie " autre moi ", une invitation à communiquer avec mon prochain.

Portrait de Partage Psy

Le post de Christine-zen résume très bien l'importance de l'acceptation. Ceci étant, vivre de la sorte nécessite une compréhension de la racine de nos agissements et de celle des personnes de notre entourage ou de la société difficile dans laquelle nous vivons.

Il a été beaucoup reproché à la psychanalyse de tout vouloir expliquer et d'accorder - entre autres - des circonstances atténuantes aux individus gênants. Ce reproche est complètement dénué de sens. L'explication psychologique d'un comportement déviant permet de l'accepter et ceci est valable pour soi. Toute personne normalement constituée est consciente de ses défauts mais tant qu'elle ne les met pas en lien avec les souffrances de son enfance, elle ne peut ni les accepter ni les éliminer. 

Portrait de Lakshmi

Partage-Psy explicite beaucoup mieux que je n'aurais pu le faire ce que je pense. Il m'a fallu un travail sur moi avec un spécialiste psy pour comprendre pourquoi je faisais des faux pas dans la vie qui me desservaient et desservaient mon entourage. Comprendre ne résout pas tout, ensuite il faut agir pour redresser la barre mais pour moi ça a été une clé indispensable.

Portrait de Elise

Avec vos posts pleins d'empathie et de bon sens, j'ai l'impression que si je me centre davantage sur moi je vais pouvoir me regarder moi-même enfin + positivement... C'est un souhait très cher que j'ai mais, grâce à vous, je sens qu'une petite lucarne optimiste s'est ouverte...

Portrait de Mireille-cogolin

Je voudrais remercier personnellement Elise pour ce sujet de discussion qu'elle a lancé. Pour d'autres raisons qu'elle, je me retrouve dans ce qu'elle a développé. La découverte de certains commentaires m'a apporté, à moi aussi, une ouverture qui, je le sens dès maintenant, pourra affaiblir certains de mes complexes qui m'ont toujours fait souffrir. Cette façon de voir nos différences comme des complémentarités est nouvelle pour moi. Je ressens une sorte d'apaisement bien agréable.

Portrait de Elise

...d'avoir humblement contribué à cette ouverture pour vous dont vous parlez... Merci beaucoup Mireille de l'avoir souligné...

Portrait de Sylviane

Un e trés belle discussion que je vais lire et relire. Moi qui me prends souvent encore pour le vilain petit canard. Merci pour cette approche tellement riche!