Je suis depuis quelques temps travaillée par cette vaste question. J’ai l’impression de me rendre compte à peu près quand je ne suis pas à ma place par des signes extérieurs que je reçois et qui me renvoient à une envie de changement. A l’inverse, je me demande comment on fait pour savoir si on est à sa place. Est-ce qu’on se pose toujours cette question mais alors la réponse est positive ? Ou bien on ne se pose plus la question car l’évidence est là ? J’aimerais partager avec vous ce questionnement. Je pense que notre place bouge avec le temps, notamment lors de changements que l’on vit. Dans ces périodes qui peuvent être tumultueuses, de changements d’habitudes, si certains repères en viennent à voler en éclats, quels sont les éléments (intérieurs, ou extérieurs ou les deux) qui peuvent nous guider pour aller dans la bonne direction ? (vers sa véritable place ?). Quelqu’un a-t-il fait l’expérience de ce sentiment diffus de ne jamais avoir été à sa place, d’un point de vue affectif ou social (c’est un peu mon cas), ou alors de ne jamais la trouver . Ouh là là, je me rends compte que cela fait beaucoup d’interrogations mais si des foromeurs ont de l’inspiration …
J’attends avec impatience vos réflexions ….
Gilbert
Une évidence qui pousse à agir !
La question est effectivement vaste, Lili. Si je m'en réfère à mon expérience, il s'agit d'être en accord avec soi, indépendamment du qu'en dira-ton. J'ai été longtemps " pas à ma place " ! Et il m'a fallu mon temps à moi de maturation pour que l'évidence me pousse à poser des actes de lâcher-prise. Les symptômes lorsque l'on est pas à sa place ? Un manque d'énergie du à ce que mes amis psys nomment une " position hystérique ", c'est-à-dire de non choix qui consiste à vouloir le beurre et l'argent du beurre. Le choix n'est jamais facile mais oh combien libérateur ! A noter également qu'une place n'est jamais définitivement acquise, c'est ce qui en fait toute la dynamique : l'impermanence comme disent les Bouddhistes : le contraire de l'esprit de fonctionnariat que j'ai longtemps exercé... Amitiés foromeuses et attendons les autres expériences de vie, toujours plus enrichissantes les unes que les autres !
Lili
Mettre en acte nos positionnements intérieurs ?
Merci pour ces éléments de réponse Gilbert, qui me parlent beaucoup. Cela me rappelle tout d’abord , ce que j’avais un peu perdu de vue (par facilité sans doute), qu’ être à sa place ne veut pas forcément dire être installée confortablement sur un fauteuil bien rembourré et y rester, mais que cela peut également signifier n’être « que sur ses deux petites jambes, que l’on sent un peu fragiles », et un peu bousculée parfois, et donc que sa place n’est alors pas confortable du tout mais que si malgré tout cela, on a l’impression qu’on est en accord avec soi, même si on n’est pas d’accord avec les autres…. C’est d’ailleurs dans ces moments d’isolement, quand être en accord avec soi-même implique de ne plus être en accord avec ceux qui nous entourent, que reconnaitre sa place fait un peu peur. Car cela est un positionnement purement individuel, que nous ne pouvons étayer que de notre propre expérience, et parfois, oups, ça fait un peu peur.
Alors pour avoir le courage de poser les actes qui vont avec, j’ai l’impression qu’il ne faut pas trop s’inquiéter de l’avenir. Est-ce le lâcher-prise dont vous parlez ?
Votre allusion au fonctionnariat me parle également : en effet, une place n’est pas définitivement acquise et étant fonctionnaire, j’ai souvent eu le sentiment de subir les « mutations »(changements de poste, de place ). Je découvre aujourd’hui qu’une « mutation » peut aussi être un choix en toute liberté, qui n’est dicté que par soi-même.
Peut être aussi avais-je l’idée que la place à atteindre devait être un but, alors que c’est dans cet enchainement de mutations, de positionnements non hystériques que l’on est à sa place, cette place unique, à soi, à occuper au jour le jour, ainsi aujourd’hui , à cet instant même, ma place est-elle peut-être devant mon écran d’ordinateur, à travailler avec vous, juste en lien avec ma place d’hier et celle de demain.
Merci mille fois, Gilbert .
Cécile. G.. Psy...
Etre en mouvement
Être à sa place, c'est parfois lâcher une position dite confortable pour une place beaucoup mois stable mais heureusement car elle n'est pas figée et en "mutation" comme vous le dites, Lili. Une mutation c'est aussi une transformation (mutation génétique), c'est la capacité à évoluer car une place n'est valable qu'à l'instant t, ici et maintenant. Aller vers sa place à soi, c'est aussi libérer une place pour quelqu'un d'autre, qui à son tour pourra évoluer. Donc trouver sa place est évolutif quant à soi mais aussi quant aux autres.
Floriane
A ma place
Et oui, je rejoins ce qui a été écrit: le lâcher-prise, le manque d'énergie quand on est pas à sa place, la place qui change, qui évolue, avec la vie, avec nous, aller vers ce qui nous correspond, sans tenir compte de ce qui "est bien quand même" aux dires d'autres qui ne sont pas nous.
J'ai fait l'expérience du "pas à ma place" professionnellement et personnellement.
Fonctionnaire moi aussi, je me souviens que mon psy de l'époque m'avait "confirmé" que ma place était dans l'Education nationale, mais il avait ajouté "ça passe par là". Et je ne comprenais pas à l'époque cette dernière précision. Je me disais, soit je suis faite pour ça, soit non.
Sauf que quelques années après, vraiment très peu, j'ai commencé à sentir que je n'avais plus envie, plus l'énergie... Et je me disais que je finirai bien par faire quelque chose d'autre un jour, sans savoir quoi, sans trop chercher non plus, et en même temps, je me disais que ça viendrait un peu tout seul, le jour où ce serait le moment pour moi. Et puis c'est devenu insupportable professionnellement, et là, j'ai trouvé l'énergie d'agir. Energie que je n'avais plus ni professionnellement, ni personnellement. Et j'ai envoyé mon inscription au centre de formation à la psychanalyse et à la psychothérapie.
Et, en cours, devenue élève analyste, je me sens vraiment à ma place. Et comme par hasard, professionnellement, ce n'est plus si terrible que ça. Ca va même beaucoup mieux. Avoir agi, me diriger vers une autre voie, m'aide à mieux vivre mon boulot. J'y prends même à nouveau du plaisir. En tout cas, ça ne me pèse plus. Je sais que ce n'est pas ma place, mais qu'actuellement, ça passe encore par là, parce que, principe de réalité oblige: faut bien gagner sa vie.
Personnellement, j'ai été longtemps célibataire avant de renconctrer l'homme qui est devenu le père de ma fille. Je suis de nouveau célibataire. Ma place n'était pas de vivre avec lui. Et "comme par hasard", je n'avais pas d'énergie quand nous vivions ensemble, constamment fatiguée, l'envie de rien, le temps de rien, à ne plus me trouver, à n'être quasiment jamais bien. La décision de le quitter n'a pas été simple à prendre, parce que l'inconnu à venir était effrayant, mais je me suis fait confiance, et j'ai osé le faire. J'ai vécu quelques mois à n'avoir pas de maison, à trimbaler ma fille à droite-à gauche, et, même si cette situation était inconfortable, je savais que j'étais à ma place... où que je sois sauf dans cette maison qui fut la notre.
Aujourd'hui, je n'ai pas de "vrai chez moi" encore. Mais je sais que je suis à ma juste place, seule.
Et pour finir Lili, votre question m'a vraiment interpellée parce que, il y a quelques années, j'ai écrit un livre dont le titre est justement "A ma place". Je ne pouvais pas résister à l'envie de commenter (plus que de répondre à vos questions d'ailleurs) et de raconter un peu de mon expérience sur ce sujet...
J'ai écrit ce livre durant la dernière année de mon analyse. Et lorsque j'ai dit à mon psy quel en était le titre, il n'a pas tardé à me dire (ce que mon inconscient savait déjà) que mon analyse était terminée.
La psychanalyse m'a permis de trouver ma place. Et elle continue.
Floriane
Je "boudais" un peu depuis
Je "boudais" un peu depuis quelques jours parce que je n'acceptais pas la frustration de n'avoir pas obtenu la ou les réponses que j'attendais aux questions que j'ai posées à propos de Simone Veil.
Et je reviens sur le forum, un peu réticente, et je trouve votre question qui m'attire. Et le désir d'écrire revient. Et je me dis que je suis à ma place ici aussi.
Alors merci Lili.
Ugo
" rester à sa place "
Où que nous soyons, nous sommes à notre place à partir du moment où celle-ci est envisagée depuis ce que nous sommes. " N'essaie pas d'être quelqu'un d'autre, la place est déjà prise " .
De là, nous pouvons nous mouvoir, évoluer tout en gardant ce centrage salvateur, seul garant de ne pas prendre la place d'un autre. C'est finalement l'acceptation du " ici et maintenant je suis ce que je suis " comme seule place possible à l'instant " t " , autrement dit " toute ma vie a convergée vers ce point précis ".
Ce positionnement carpe diem offre une visibilité sur ce qui ne nous convient plus, nous ouvrant la porte de ce qui nous conviendra mieux. A nous ensuite de franchir le pallier.
Trouver sa place c'est ne plus chercher à être cet autre du passé, ne plus se projeter dans l'autre du futur, bref, ne plus faire comme les autres...
cricri
De la souffrance à l'acceptation, un chemin évolutif
Je ne suis pas une intellectuelle mais je suis mariée avec avec un professeur de philosophie qui a toujours eu la " sagesse " (ce qui est bien normal compte tenu de sa profession) de me laisser vivre et comprendre ce que j'avais à expérimenter et à saisir... C'est ainsi que j'ai fini par réaliser (au sens freudien du terme) que la souffrance psychologique, voire la douleur physique (extrême limite du Moi), sont là pour nous indiquer que nous ne sommes pas - ou plus - à notre place. Sauf qu'il existe des circonstances qui font que nous ne pouvons pas changer raisonnablement les choses. N'oublions pas que certaines personnes ne sont pas bien dans leur travail mais qu'elles ont besoin de gagner leur vie, de nourrir leur famille, de payer un loyer ou un crédit voiture, entre autres... Elles ne peuvent donc pas tout envoyer paître d'un revers de main... Dans ce cas, s'impose toujours à soi une issue supplémentaire à disposition : la merveilleuse acceptation. Certes, elle demande d'entrer dans un monde plus spirituel que matériel, elle exige surtout de beaucoup travailler sur soi mais, au final, elle rend heureux où que nous soyons... Et puis n'oublions pas que les voies du Seigneur sont impénétrables et que l'apparence de certaines situations difficiles ont leur raison d'être...
Isabelle
Oui pour l'Acceptation !
Merci Cricri de rappeler le bien fondé du principe de réalité... Gagner sa vie sur un plan matériel, c'est aussi se donner la possibilité, de prendre un recul salutaire, sur ce que signifie "avoir et être", dans le bon sens justement...
Car en définitive, même si l'on "sait" pour soi, que dans son emploi on est plus tout à fait à sa place déjà, par principe de réalité protecteur... cet "avoir" permet tout autant d'accepter que notre chemin de vie reste cependant, peut-être même "encore plus", une véritable évolution en regardant du côté de "l'être"... Ce n'est certes pas la voie la plus facile...
Mais même s'il m'arrive, plus qu'à mon tour... de me "révolter" sur certains aspects que je "ressens" comme "injuste"... En parallèle, j'accepte Ce Chemin, puisque fondamentalement, c'est le mien... Sinon déjà, il serait différent... Et puis si ma situation est ce qu'elle est à l'instant "t", c'est bien qu'elle m'est nécessaire, dans le sens évolutif, pour me permettre justement de développer "l'être"... Au fond, et à titre tout à fait personnel, c'est encore la meilleure façon de travailler, à ma mesure, sur ce qu'humilité veut dire... Et je crois que je n'en fais pas toujours preuve d'humilité justement, lorsque "j'oublie" tout ce que cet emploi m'assure... Ne serait-ce que parce qu'avoir un toit sur la tête, subvenir à mes besoins au sens large, permet en soi d'avoir malgré tout, l'esprit un peu plus libre, et donc de se "nourrir" de "richesses" plus du tout matérielles en soi... Et pourtant essentielles...
Viviane
Gagner sa vie...
Je trouve que l'expression "gagner sa vie", déjà en soi, c'est très positif !
Et puis, juste à titre un peu plus féminin, même si le fait qu'une majorité de femmes travaillent aujourd'hui, n'oublions pas, que nous devons une forme certaine de libertés individuelles au fait même d'être des femmes actives... puisque les hommes étaient soldats morts ou vivants, durant le 1ère Guerre mondiale... Ce qui en soi, n'est pas si loin dans le temps...
D'ailleurs, et même si c'est très "simpliste" de le dire comme ça, c'est bien aussi les aspects trop passifs des femmes de l'époque... qui ont permis à Sigmund Freud, en parallèle, de "construire" la théorie et l'application psychanalytique... Et puis Monsieur Freud disait toute l'importance du travail...
Travailler, même si ce n'est que pour "gagner sa vie", en soi c'est précieux... ne serait-ce que parce que le temps consacré à ce travail, n'est pas du temps gaspillé, quoi qu'il en soit... Durant ce temps, on ne se prend pas la tête "à se faire un monde imaginé meilleur" déjà... Et puis aussi, c'est quand même confortable, lorsqu'on rentre chez soi, de s'arrêter faire quelques courses ou même de "pouvoir" acheter de quoi se nourrir et nourrir les enfants... C'est ce qui a été le "moteur" des femmes durant la 1ère Guerre mondiale d'ailleurs... Mais "gagner sa vie" induit bien "un" gain... Ce qui veut bien dire, que même si dans son travail, on est pas véritablement à sa place, pourtant on n'est pas "perdant"... Et puis, même avec le terme travail, il y a toujours une notion de "labeur" certes, mais pourtant qu'on peut rattacher autant à "l'avoir" qu'à "l'être", pour reprendre ce que dit Isabelle plus haut... Ainsi, on parle bien tout autant de "travail" en terme "d'emploi", mais aussi de "travail analytique" et encore de "travail spirituel"...
Lili
désidéaliser !
Bonjour à tous et surtout merci pour vos témoignages qui m’ont bien éclairée.
Effectivement, quand je vous lis Flora, la notion d’être à sa place me renvoie bien à une mobilité et une évolution. Sans doute en avais-je une conception trop statique qui ne « collait » pas à ma réalité. Ce qui donne à la notion d’ « être à sa place » une valeur assez ponctuelle finalement : oui, Ugo, je suis d’accord avec vous, cela dépendrait du moment. Je pense que la notion « d’être à sa place dans la vie » me semblait un peu ambitieuse et parfois « paralysante », comme un but à atteindre alors que si je la vois comme une succession d’instants auquel on fait ce qu’on peut pour rester à sa place, je relativise et cela me semble plus accessible, tout simplement.
Votre post Isabelle, m’a (comme toujours quand je vous lis je dois dire) beaucoup parlé. Ainsi que celui de Viviane d’ailleurs, que je trouve complémentaire : Oui, parfois l’ « Avoir »n’a pas que du mauvais, car il permet aussi l’émergence de l’Être : avoir un travail, gagner sa vie (une belle expression malgré tout), permet de faire des choix et donc de se relier à soi-même, à qui l’on est : vous parlez des enfants et avoir un travail m’a bien souvent permis, plus que de juste les nourrir, de leur faire plaisir aussi et de ne pas trop m’angoisser pour les fins de mois, malgré un tempérament plutôt anxieux. De plus, je suis enseignante et mon emploi du temps m’a également permis, notamment quand ils étaient en bas âge, d’être auprès d’eux et de les accompagner comme je le souhaitais. De construire une vie de couple et de famille qui m’apporte aujourd’hui encore de nombreuses satisfactions, voire un équilibre salvateur quand je me sens dépassée par les événements « au travail » parce que je ne prends pas assez en compte mes limites. Mon entourage me rappelle aussi à une part de ma réalité. Et en ce qui me concerne, je pense que mon indépendance financière à également contribué à me libérer d’un certain abandonnisme dans mon couple. Savoir que ça n’est pas la dépendance financière qui nous oblige à vivre notre vie avec quelqu’un permet de se poser des questions et d’oser les partager avec cette personne. Le fait de savoir que l’on pourrait vivre sa vie sans l’autre si on le voulait, fait voir le couple autrement, donne plus de liberté, y compris celle d’assumer certains côtés de cette alliance, mais par choix et non pas par contrainte.
Enfin, je pense que je dois avoir tout simplement idéalisé cette notion « d’être à sa place », ce qui me la rendait inaccessible, alors qu’être à sa place et savoir y rester est un « travail » qui se construit tous les jours et au jour le jour, quelle que soit sa position sociale, avec les liens que l’on tisse , même si parfois, cela implique de laisser derrière nous certains liens qui ne nous conviennent plus pour en créer d’autres, mais toujours en lien avec notre être véritable. De plus, le positionnement interne précède parfois le positionnement externe, d'où cette impression de décalage que je peux ressentir parfois et l'impression que l'éxtérieur ne suit pas mais ce décalage n'est qu'un leurre car le positionnement externe, la place visible, n'est rien d'autre que notre réalité à l'instant "t", qu'il faut dans un premier temps accepter si l'on veut pouvoir la faire évoluer comme vous le dites Cricri. Donc, jusqu’à présent, j’étais sans doute déjà à ma place dans mon « travail » et peut être le suis-je encore aujourd’hui, même si je me prépare actuellement à une évolution (transformation, mutation dans l’autre sens, oui, Cécile) professionnelle.
Merci à vous en y tout cas pour m’avoir permis d’y voir un peu plus clair et de continuer à évoluer sans « bloquer » sur cette histoire de place !
Bonne journée, je vais maintenant .......travailler !
Isabelle
Désidéaliser c'est protecteur !
A mon tour de vous remercier Lili, et sans aucune "séduction" de ma part ! C'est aussi grâce à vous que cette véritable réflexion s'est développée... Vous êtes donc comme on le dit en analyse, agent d'évolution permettant ainsi de "mieux travailler"... Bonne journée également !