Je ne supporte pas qu'on me prenne en photo

J'avoue que je suis un peu comme vous Iverlaine. Avec les téléphones portables, je vois des gens qui prennent tout et n'importe quoi. Et le pire, c'est que certains ne se gênent pas pour publier leur truc sur les réseaux sociaux. Il me semble que les progrès de la technologie ouvrent la porte au non respect. Autrefois, les photos commémoraient un évènement, quelque chose de précis auquel on se soumettait ou pas. Désormais, c'est devenu n'importe quoi. A mon sens, trop c'est trop ! D'ailleurs après certaines dérives, les écoles font signer toutes les années aux parents une autorisation de droit à l'image, même pour une simple photo de classe. C'est bien qu'il y a un problème, un certain viol d'intimité. Peut-être suis-je un peu parano, mais il me semble que c'est une simple question de respect et de bon sens. Mais, comme vous le demandez, il y a peut-être une explication psy à cette colère. Je sais que certaines peuplades dites primitives ne veulent pas se faire prendre en photos car elles pensent qu'on leur vole leur âme... J'attends d'autres réactions pour comprendre moi aussi !

Il est vrai qu'actuellement tout est pris en photo, de façon compulsive et sans limite puis mis sur les réseaux. Prendre en photo pour s'approprier quelque chose d'éphémère, un souvenir et ensuite mettre sur les réseaux sociaux comme pour donner à voir sa collection de bons moments.  Les slogans pour appareils photo parlent de "capturer le moment présent", "plus rien ne vous échappe", "pour fixer à jamais"...

J'ai vécu cela lors d'un voyage avec mon mari, nous étions dans un café atypique par sa décoration et les touristes, en passant devant la devanture, prenaient en photo l'intérieur du café. Le problème c'est que nous étions sur les photos et que personne ne nous a demandé notre avis. Mon mari disait : "Souris, nous partons pour la chine, le japon ...."

Le fait de compulser sur cette prise de photo représente une difficulté d'abstraction et cela fait écho à une fixation infantile : Lorsque maman quitte la pièce, avant 7/8 mois, l'enfant est incapable de la moindre représentation abstraite et vit ce départ comme une perte de son moi. Toute perte deviendra pénible à vivre même s'il s'agit d'objet insignifiant. Cette fixation est proportionnelle à l'histoire de chacun.

Prendre tout en photo est le moyen de ne pas vivre la perte de ce bon moment parce que le souvenir n'est pas suffisant pour calmer l'angoisse, puis il est affiché sur les réseaux et permet d'augmenter la collection : c'est rassurant, rien n'a été perdu !

Le fait Iverlaine que vous réagissiez de façon agressif à la prise de photo c'est que ce processus doit vous parlez car lorsqu'on vous "prend" en photo, votre inconscient fantasme qu'on lui vole quelques chose, comme l'exemple des peuplades primitives de Nanou-69, il est  en situation de perte : Vous avez dit "bouffe" et "rogne", on vous prend un bout de vous même. Il serait intéressant de chercher dans votre histoire des situations liées à la perte !

Je comprends mieux avec ces explications pourquoi je n'ai jamais aimé être prise en photo, et en plus en général, lorsque je me regarde sur une photo, je ne me plaîs jamais. Avec la perte de mes parents lorsque j'étais enfant puis les décés suivants en tant qu'adulte... Mais ça signifie, vu les comportements actuels, que je vous avoue ne pas comprendre... que la société se voile la face sur une angoisse finalement relativement naturelle en soi, sauf que chacun doit en faire quelque chose, avec ce qu'il est si j'ai bien compris... Hors ça voudrait dire qu'à l'heure actuelle, l'être humain devient de plus en plus faible. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, finalement on cherche à ne plus se regarder en face d'une certaine façon !