Il n'y a pas que notre héritage judéo-chrétien pour nous faire croire que nous commettons des erreurs à tout bout de champ. Il y a aussi des modèles extérieurs à soi qui se présentent comme la vérité absolue de ce que nous devrions être ou de ce que nous devrions faire. Et c'est à pieds joints que nous tombons dans ce piège qui a l'art de confondre habilement l'inconscient collectif avec l'inconscient individuel...
Les Américains et les Canadiens viennent heureusement à notre rescousse depuis quelques décennies. Ces populations particulièrement diversifiées s'appuient par mentalité, nécessité et historicité interposées sur la force du temps présent. Elles nous ont invités progressivement à ne plus voir nos comportements en terme de faute mais plutôt d'expériences acquises grâce à nos hésitations, nos trébuchements, nos changements d'avis, nos remises en question... Leurs mouvements volontaristes nous ont appris à ne plus confondre le lien qui nous unit à nous-même et le lien qui nous unit aux autres. Effectivement, parler d'erreur est logique quand nous cherchons à réduire un membre de notre entourage, ou à l'humilier, ou à le manipuler, ou à le spolier, ou à le blesser, ou à le dénier, ou à le détruire... Il s'agit donc raisonnablement de ne pas imaginer que nous pouvons nous abîmer personnellement, spontanément, psychologiquement et/ou physiquement. Cette nuance est primordiale.
. Claudine tenait un petit snack, près d'un lycée. Au nom de la réglementation, cet établissement ne pouvait servir qu'une bière faiblement alcoolisée aux consommateurs majeurs à condition qu'ils prennent un plat chaud mais assis. En fait, la commerçante servait de l'alcool à de jeunes lycéens mineurs dans une arrière-salle... Les choses se sont sues publiquement. La boutique a fermé. Quelques années plus tard, Claudine est décédée d'un cancer du foie à 40 ans, elle qui ne buvait pas la moindre goutte d'alcool... Ce drame allie erreur quant à l'entourage (transgression de la loi + profit financier + manipulation de profils immatures) et rétorsion inévitable.
. Fabien a fait d'excellentes études qui lui ont ouvert une belle carrière militaire. Il gagne très bien sa vie et apprécie son évolution professionnelle. Par contre, côté cœur, il n'est jamais parvenu à se stabiliser. Ses relations amoureuses ont toujours été tellement improbables et chaotiques qu'elles sont dignes de scénarios de films intimistes... Son incompréhension devant ses souffrances sentimentales récurrentes l'ont conduit à suivre une cure analytique qui a mis à nu une homosexualité refoulée jusqu'ici (son demi-frère est homosexuel et, inconsciemment, ce patient fantasmait pouvoir " infliger " à ses parents une douleur supplémentaire en les privant, à son tour, de la possibilité d'avoir des petits-enfants). Ainsi Fabien combattait-il à son insu ce qu'il croyait être une erreur, alors qu'il s'agissait de son identité réelle...
Ce précédent exemple montre l'importance de prendre en compte notre existence en tant que seul terreau possible pour une transformation favorable. Encore une fois, nous ne commettons pas d'erreur vis-à-vis de soi. Dans le plus mauvais des cas, nous nous limitons jusqu'au jour où notre mal-être est tellement insupportable que cet état nous pousse à modifier certains réflexes étriqués pour nous sensibiliser et nous amener à connaître notre essence véritable. Le chemin se fait à chaque fois plus lumineux, nous encourageant à aller davantage encore à la rencontre de celle ou de celui que nous avons toujours été et ce, pour commencer enfin à savourer notre vrai-self. Certes, ce raisonnement nous éloigne ici sensiblement des théories de Descartes selon lesquelles l'Homme est imparfait. Mais combien même les agissements humains ne seraient " que " perfectibles, toujours est-il que chacun abrite en son sein une Conscience élevée, comme en témoignent d'évidence les rouages parfaits de l'Univers...